Kara Mehmed Pacha

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Kara Mehmed Pacha
Fonction
Beylerbey de Bosnie
-
Kemankeš Sulejman-paša (d)
Hadži Bećir-paša (d)
Biographie
Décès
Activités

Kara Mehmed Pacha, mort le à Buda, est un "Grand Ambassadeur" de l'Empire ottoman à Vienne en 1665. Le détail de cette ambassade nous est connu grâce, notamment, à la chronique d'un témoin oculaire, Evliya Celebi, qui la décrit dans le volume VII de son "Livre des voyages". Kara Mehmed Pacha meurt en 1684 en tentant de défendre la forteresse de Buda assiégée par les troupes impériales des Habsbourg.

Biographie[modifier | modifier le code]

Entrée du Grand Ambassadeur ottoman Kara Mehmed Pacha à Vienne le 8 juin 1665

En août 1664, la bataille de Saint-Gothard est perdue par les Ottomans. Léopold Ier de Habsbourg et le sultan Mehmed IV signent alors la paix d'Eisenburg (ou de Vasvar), un traité qui garantit la paix entre les nations pour vingt ans. Ils décident également d'une cérémonie de remise de cadeaux diplomatiques qui se tiendra à Vienne l'année suivante, soit en juin 1665.

Sur le conseil du futur grand vizir Kara Mustafa, le sultan choisit comme Grand Ambassadeur Kara Mehmed Aga, un membre du corps d'élite des conseillers impériaux à la cour. Il confie à Kara Mehmed le gouvernement de la Roumélie pour qu'il bénéficie du titre de Pacha.

Le 30 janvier 1665, Kara Mehmed Aga, devenu donc Kara Mehmed Pacha, quitte la cour d'Edirne. Comme présents pour l'empereur, il emporte avec lui un diamant, une tente, des tapis, de l'ambre, divers plateaux et deux chevaux arabes. Le 8 juin, il entre dans Vienne. Le 18 juin, il rencontre l'emperereur. Une partie de la délégation reste à Vienne jusqu'en mars 1666[1].

Par la suite, Kara Mehmed Pacha remplit différentes fonctions. En 1671, il devient vizir. En 1683, en tant que chef militaire, il marche avec le grand vizir Kara Mustafa contre Vienne qu'il connaît grâce à son ambassade de 1665. Après la défaite des Ottomans, il tente de défendre la forteresse de Buda mais y trouve la mort en 1684[2].

L'ambassade[modifier | modifier le code]

La description de l'ambassade à Vienne par le chroniqueur Evliyâ Celebi est l'une des sections de son "Livre des voyages" (Seyahatnâme (en), VII.54a–73a) qui a suscité le plus d'intérêt. On peut y lire un portrait haut en couleur de l'empereur Léopold Ier ("C'est un garçon de taille moyenne, pas très corpulent et de taille fine. Par la volonté de Dieu il a une. tête en forme de bonnet de derviche, à moins qu'elle ne soit en forme de courge ou de carafe. Ses yeux sont ronds comme ceux du hibou, ses cils longs et noirs, son visage allongé avec une face de vieux renard, ses oreilles grandes comme des souliers de garçonnet, un nez grand et rouge comme une aubergine..."), le récit du détail des négociations et les tensions provoquées par les règles protocolaires, l'échange des présents et l'échappée d'un des purs-sang arabes qui tue plusieurs personnes en s'enfuyant à travers la ville. Mais aussi et surtout une description détaillée de la ville de Vienne : ses monuments, les habitudes de vie, la pratique médicale et la description d'une opération, les remparts[3].

Du côté européen, le diplomate François Mesgnien a laissé une relation détaillée de l'ambassade à Vienne[4].

On aurait également conservé une version latine "allégée" d'un rapport ottoman, destinée à Vienne, dans laquelle on ne retrouverait pas les informations concernant les murailles de la ville[5].

Références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Gisela Procházka-Eisl, Evliyâ Çelebi’s Journey to Vienna, dans Tezcan, Nuran & Semih (eds.): Evliyâ Çelebi. Studies and Essays Commemorating the 400th Anniversary of his Birth. Istanbul 2012,, pages 110-114 (lire en ligne) Dans "Explorateurs de la modernité", Stéphane Yerasimos considère que Kara Mehmed Pacha est resté lui-même jusqu'en mars 66 et qu'il aurait laissé un récit de sa main de cette ambassade, mais il ne donne pas la source de cette information (Stéphane Yerasimos, "Explorateurs de la modernité. Les ambassadeurs ottomans en Europe", Genèse, 1999, 35, p. 65-85, p. 69 note 17, lire en ligne: https://www.persee.fr/doc/genes_1155-3219_1999_num_35_1_1567).
  2. (en) Stefan Schreiner, The Ottomans in Europe, pages 189-193
  3. (de) Pour une édition et une traduction allemande du récit de Vienne, voir Richard Kreutel, Im Reiche des goldenen Apfels,, Graz-Vienne,
  4. Relatione del Sign Mesgnien di ció ch’è passato circal’Ambasciata sollenne Turchesca nel l’anno 1665 et 1666, Austrian State Archives, Turcica I, Box 138. fol. 231–257 (cité par Gisela Procházka-Eisl, Evliyâ Çelebi’s Journey to Vienna, p. 111).
  5. (en) Schreiner, The Ottomans in Europe, page 196 (l'auteur en tire la conclusion que la description des remparts par Evliya aurait résulté d'une forme d'espionnage et dès lors volontairement censurée de ce rapport destiné à Vienne).

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Richard Kreutel, Evlijā Čelebīs Bericht über die Botschaftsreise des Qara Mehmed Pascha nach Wien (1665), Vienne, 1948.
  • Richard Kreutel, Im Reiche des Goldenen Apfels. Des türkischen “Weltenbummlers Evliyâ Çelebi denkwürdige Reise in das Giaurenland und in die Stadt und Festung Wien anno 1665", Graz-Vienne, 1957.
  • Gisela Procházka-Eisl, "Evliyâ Çelebi’s Journey to Vienna", dans Nuran Tezcan, Semih Tezcan, éd., Evliyâ Çelebi. Studies and Essays Commemorating the 400th Anniversary of his Birth, Istanbul, 2012, pages 110-114.
  • Stefan Schreiner, The Ottomans in Europe. Memories and reports by Turkish historians. Verlag Styria, Graz-Vienne-Cologne 1985, (ISBN 3-222-11589-3) .
  • Karl Teply, “Evliyā Çelebī in Wien”, dans Der Islam, 52 (1975), pages 125–31.
  • Stéphane Yerasimos, "Explorateurs de la modernité. Les ambassadeurs ottomans en Europe", Genèse, 1999, 35, p. 65-85, p. 69 note 17, lire en ligne: https://www.persee.fr/doc/genes_1155-3219_1999_num_35_1_1567).