Algèbre alternative

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En algèbre, une algèbre alternative est une algèbre dans laquelle la multiplication n'est pas nécessairement associative mais satisfait à deux identités exprimant l'alternativité, à savoir

pour x et y quelconques dans l'algèbre.

Toute algèbre associative est évidemment alternative mais certaines algèbres strictement non associatives telles que les octonions le sont aussi.

L'associateur[modifier | modifier le code]

Les algèbres alternatives sont ainsi nommées car ce sont les algèbres pour lesquelles l'associateur est alterné. L'associateur est l'application trilinéaire définie pour x, y et z quelconques par

.

Par définition, une application multilinéaire est alternée si elle s'annule dès que deux de ses arguments sont égaux. Les identités alternatives à gauche et à droite pour une algèbre sont respectivement équivalentes à[1]

Ces deux identités impliquent ensemble que

pour tous x et y. Cette condition est équivalente à l'identité flexible[2]

L'associateur d'une algèbre alternative est donc alterné. Réciproquement, toute algèbre dont l'associateur est alterné est clairement alternative. Par symétrie, toute algèbre qui satisfait à deux des trois conditions suivantes :

  • identité alternative à gauche :
  • identité alternative à droite :
  • identité flexible :

satisfait également à la troisième ; elle est donc alternative.

Un associateur alterné est toujours totalement antisymétrique, c'est-à-dire que

pour toute permutation de {1, 2, 3}. La réciproque est vraie si la caractéristique du corps de base n'est pas 2.

Exemples[modifier | modifier le code]

Non-exemples[modifier | modifier le code]

Propriétés[modifier | modifier le code]

Le théorème d'Artin stipule que dans une algèbre alternative, la sous-algèbre engendrée par deux éléments quelconques est associative[4]. Réciproquement, toute algèbre pour laquelle cette condition est vérifiée est manifestement alternative. Il en résulte que dans une algèbre alternative, les expressions impliquant seulement deux variables peuvent être écrites sans ambiguïté sans parenthèses. Une généralisation du théorème d'Artin exprime que chaque fois que trois éléments x, y et z d'une algèbre alternative annulent l'associateur (c'est-à-dire que ), la sous-algèbre engendrée par ces éléments est associative.

Un corollaire du théorème d'Artin est que les algèbres alternatives sont associatives des puissances, c'est-à-dire que la sous-algèbre générée par un seul élément est associative[5]. La réciproque n'est pas vraie : les sédénions sont une algèbre associative des puissances mais pas alternative.

Les identités de Moufang

ont lieu dans n'importe quelle algèbre alternative[2].

Dans une algèbre alternative unitaire, les inverses pour la multiplication sont uniques pour autant qu'ils existent. De plus, pour tout élément inversible x et tout y on a

Il est équivalent de dire que l'associateur s'annule pour de tels x et y.

Si et sont inversibles alors l'est aussi et son inverse est . L'ensemble des éléments inversibles est donc stable par multiplication et il forme une boucle de Moufang. Cette boucle des unités dans un anneau ou algèbre alternatif est analogue au groupe des unités dans un anneau ou algèbre associatif.

Le théorème de Kleinfeld exprime que tout anneau alternatif non associatif simple est une algèbre d'octonions généralisée sur son centre[6]. Plus généralement, la structure des anneaux alternatifs est présentée dans le livre Rings That Are Nearly Associative de Zhevlakov, Slin'ko, Shestakov et Shirshov[7].

Applications[modifier | modifier le code]

Le plan projectif sur toute algèbre à division alternative est un plan de Moufang.

La relation étroite entre les algèbres alternatives et les algèbres de composition a été établie par Guy Roos en 2008[8]. Soit A une algèbre ayant pour unité e et munie d'un anti-automorphisme involutif tel que a + a* et aa* appartiennent à la droite engendrée par e pour tout a dans A. On note n(a) = aa* pour tout a de A. Si n est une application non singulière dans le corps de base de A et si A est alternative, alors (A, n) est une algèbre de composition.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Schafer 1995, p. 27.
  2. a et b Schafer 1995, p. 28.
  3. John Horton Conway et Derek A. Smith, On Quaternions and Octonions: Their Geometry, Arithmetic, and Symmetry, A. K. Peters, (ISBN 1-56881-134-9, zbMATH 1098.17001)
  4. Schafer 1995, p. 29.
  5. Schafer 1995, p. 30.
  6. Zhevlakov et al. 1982, p. 151.
  7. Zhevlakov et al. 1982.
  8. Guy Roos, « Exceptional symmetric domains; §1: Cayley algebras », dans Bruce Gilligan & Guy Roos, Symmetries in Complex Analysis, vol. 468, American Mathematical Society, coll. « Contemporary Mathematics », , p. 157-189.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Lien externe[modifier | modifier le code]

(en) K. A. Zhevlakov, « Alternative Rings and Algebras », dans Michiel Hazewinkel, Encyclopædia of Mathematics, Springer, (ISBN 978-1556080104, lire en ligne)