Antoine de Lonhy

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Antoine de Lonhy
Naissance
Années 1420
Duché de Bourgogne
Décès
Années 1490
Duché de Savoie
Période d'activité
Activité
Peinture, enluminure, peinture sur vitraux, peinture sur broderie, peinture sur sculpture
Formation
Atelier à Chalon-sur-Saône
Lieux de travail
Influencé par
Barthélémy d'Eyck, Robert Campin, Enguerrand Quarton, Jaume Huguet

Antoine de Lonhy est un peintre, enlumineur et peintre-verrier du XVe siècle d'origine bourguignonne. Caractérisé par son itinérance, il est actif entre 1446 et 1490 en Bourgogne, à Toulouse, en Catalogne, en Savoie et au Piémont.

Historiographie[modifier | modifier le code]

Trinité de Turin.

La redécouverte d’Antoine de Lonhy débute en 1972, avec la publication d’un article de Charles Sterling sur le Maître de la Trinité de Turin. Il constitue la personnalité d’un peintre qu’il considère comme bourguignon et qui aurait été actif dans le Piémont vers 1480-1490. Il considère d’ailleurs cet artiste comme un disciple de l’enlumineur des Heures de Saluces[1].

En 1988, Giovanni Romano propose d’identifier le Maître de la Trinité de Turin à la personnalité d’Antoine de Lonhy sur la base de deux œuvres documentées, dont on a retrouvé la trace des commandes dans des archives à Toulouse[2]. En 1989, il propose de fusionner cet Antoine de Lonhy avec le Maître de la sainte Anne.

En parallèle, François Avril parvient au même résultat par un autre chemin. Il va reprendre la proposition de Charles Sterling et plutôt que de considérer le Maître de la Trinité de Turin comme un disciple de l’enlumineur des Heures de Saluces, il va établir qu’il s’agit de la même personne[3]. Cela lui permet d’aller plus loin et même de retracer l’itinéraire de ce peintre, qui peint dans le Piémont et en Languedoc, et qui est vraisemblablement issu de Bourgogne.

En 1994, Philippe Lorentz confirme qu’Antoine de Lonhy est bien présent en Bourgogne au moins en 1446, puisqu’il découvre un document qui atteste que le peintre est au service de Nicolas Rolin, le chancelier de Philippe le Bon[4]. Philippe Lorentz attribue également en 2005 à Antoine de Lonhy les peintures de Notre-Dame de la Dalbade à Toulouse[5].

Biographie[modifier | modifier le code]

Origines et formation[modifier | modifier le code]

Antoine de Lonhy est cité pour la première fois sous le nom d' « Anthoine de Loigney [...] pointre demourant a Chalon », ce qui peut le faire naître dans une des deux villes du département actuel de Saône-et-Loire, Lugny-lès-Charolles ou Lugny près de Mâcon[4].

Il suit une formation d’enlumineur vers 1435-1440 probablement à Chalon-sur-Saône par un maître ancré dans le gothique international[6]. Il est influencé par les modèles de l’ars nova diffusés par Barthélemy d'Eyck et plus généralement par l'enluminure parisienne du deuxième quart du XVe siècle[6].

Période bourguignonne[modifier | modifier le code]

En 1446, Antoine de Lohny entre au service de Nicolas Rolin[4] et examine probablement des œuvres des Primitifs flamands, tels que Jan Van Eyck et de Robert Campin[6]. Il collabore durant cette période avec le verrier Euvrard Robert[4]. C’est probablement à la suite de cette rencontre qu’il acquiert une formation de verrier. En 1449, il effectue des travaux pour l’évêque Jean Germain, comme le frontispice de la Mappemonde spirituelle[7],[8].

Période languedocienne et catalane[modifier | modifier le code]

Dans le Languedoc[modifier | modifier le code]

Antoine de Lonhy part ensuite pour Toulouse au plus tard en 1454 puisque l'on trouve la date sur la fresque de la Dalbade[5] (désormais au musée des Augustins à Toulouse[9]). L’hypothèse la plus probable concernant son départ est le fait qu’il est recommandé par Jean Germain auprès de l'archevêque Bernard Rosier (même réseau de prélats), qui recrutait à ce moment pour effectuer les vitraux de la cathédrale de Toulouse (désormais détruits)[6]. L'évolution de son style trahit peut-être un passage par Avignon, alors qu'il se rendait à Toulouse vers 1452[3]. Il réalise aussi le frontispice du traité Semita recta ad montem salutis, daté du 29 juin 1460, dédié à Bernard Rosier[6].

En Catalogne[modifier | modifier le code]

Grande rosace de la Basilique Sainte-Marie-de-la-Mer de Barcelone.

Antoine de Lonhy devait être un peintre-verrier reconnu car le , il passe un contrat avec les fabriciens de l'église Santa Maria del Mar de Barcelone pour l'exécution des vitraux de la grande rosace[10]. En 1462, il signe d'autres contrats à Barcelone et réalise un retable pour le monastère des Augustins de Domus Dei, à Miralles [10],[11]. C'est dans ces documents qu'il est écrit qu'Antoine de Lonhy est un habitant d'Avigliana, mais résidant à cette époque à Barcelone[12].

Période savoyarde[modifier | modifier le code]

Antoine de Lonhy jouit apparemment d'une grande réputation puisqu'il se transfère à Avigliana, dans le duché de Savoie et le diocèse de Turin[11],[10]. Ce village a l’avantage de se trouver dans l’axe qui relie les deux pôles du duché, à savoir Turin et Chambéry[13]. Il est probablement recommandé via le même réseau de prélats auprès de l’évêque de Turin, Ludovico da Romagnano, qui cherche à renouveler le décor de la cathédrale au début des années 1460[14].

Il entre ensuite au service du duché de Savoie, en particulier de Yolande de Savoie, en tout cas en 1466[15]. Elle lui confie notamment l'achèvement des Heures dites de Saluces[16]. Un des folios évoque une invention qui rappelle les volets du maitre-autel de la cathédrale Saint-Pierre à Genève, ce qui attesterait de son passage par Genève pour se rendre au duché de Savoie[17]. Elle lui commandera aussi le Breve dicendorum compendium vers 1477, un traité destiné à éduquer son fils Philibert[18].

Il continue de réaliser des œuvres dans les années 1470-1490 dans le Piémont et en Savoie. C'est le cas notamment de la Trinité de Turin et la Sainte Anne, qui ont permis son identification.

Œuvres[modifier | modifier le code]

Peintures[modifier | modifier le code]

Retable des Augustins de Domus Dei de Miralles

Enluminures[modifier | modifier le code]

Crucifixion (Antoine de Lonhy), Galerie nationale de Prague
Maiestas Domini, J. Paul Getty Museum.

Vitraux[modifier | modifier le code]

Expositions[modifier | modifier le code]

Antoine de Lonhy fait l'objet de l'exposition "Il Rinascimento europeo di Antoine de Lonhy", au Palazzo Madama, à Turin (octobre 2021 - janvier 2022)[33].

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Clément Gardet, préface de Pierre Duparc, Les Heures d'Aimée de Saluces, vicomtesse de Polignac, et Catherine d'Urfé. Aspects internationaux et évolution dans la peinture dans les États de Savoie au XVe siècle, Gardet éditeur (collection Ars Sabaudiae - De la peinture du Moyen Age en Savoie, tome 5), Annecy, 1985, (ISBN 978-2-70490006-0), . (compte-rendu par Francis Salet, dans Bulletin Monumental, 1987, tome 145, no 2, p. 250-251
  • François Avril, « Le maître des Heures de Saluces, Antoine de Lonhy », Revue de l'Art, vol. 85, no 1,‎ , p. 9-34 (DOI 10.3406/rvart.1989.347785, lire en ligne)
  • Giovanni Romano et Christine Piot, « Sur Antoine de Lonhy en Piémont », Revue de l'Art, vol. 85, no 1,‎ , p. 35-44 (DOI 10.3406/rvart.1989.347786)
  • Philippe Lorentz, « Une commande du chancelier Nicolas Rolin au peintre Antoine de Lonhy (1446) : la vitrerie du château d'Authumes », dans Bulletin de la Société de l'Histoire de l'art français, 1994, p. 9-13
  • F. Quasimodo, « Antoine de Lonhy, Maestro delle Ore di Saluzzo », dans Dizionario biografico dei miniatori italiani, secoli IX-XVI, Edizioni Sylvestre Bonnard, Milan, 2004, p. 26-29, (ISBN 88-86842-70-8) ; 1089p.
  • Philippe Lorentz, « Une œuvre retrouvée d'Antoine de Lonhy et le séjour à Toulouse du peintre bourguignon », dans Revue de l'art, 2005, no 147, p. 9-27
  • Marie Bedel, Le manuscrit 2881 : un livre d'heures de la bibliothèque d'étude et du patrimoine de Toulouse, maîtrise d'histoire de l'art, Université de Toulouse II, Toulouse, 2005
  • François Avril, « Un nouveau témoignage de l'activité toulousaine d'Antoine de Lonhy », Per Giovanni Romano. Scritti di amici, dans L'Artistica, Cuneo, 2009, p. 10-11
  • Philippe Lorentz, « Antoine de Lonhy », dans sous la direction de Pascale Charron et Jean-Marie Guillouët, Dictionnaire d'histoire de l'art du Moyen Âge occidental, éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 40-41, (ISBN 978-2-221-10325-8) ; 1128 p.
  • (it) Giovanna Saroni, « Intorno a un Libro d'Ore di Antoine de Lonhy giovane », dans Studi e notizie. Rivista annuale del Museo Civico d’Arte Antica di Torino, Palazzo Madama, anno I, 2010, p. 7-23
  • Frédéric Elsig, Antoine de Lonhy, Silvana Editoriale, Milan, 2018, (ISBN 978-8-83663869-7).
  • Giovanna Saroni, traduction par François Arnauld et Éliane Vergnolle, « À propos de la découverte de la Mise au Tombeau d'Antoine de Lonhy à Saint-Jean-de-Maurienne », dans Bulletin monumental, 2019, tome 177, no 2, p. 139-150, (ISBN 978-2-901837-78-7)
  • Mireia Castaño, « Frédéric Elsig, Antoine de Lonhy », Bibliothèque d’Humanisme et Renaissance, 81, 2019, 1, p. 231-234.
  • Mireia Castaño, « Un somptueux missel toulousain enluminé par Antoine de Lonhy », dans Peindre à Toulouse aux XVe et XVIe siècles, Frédéric Elsig (éd.), Milan, 2020, pp. 70-81.
  • (it) Il Rinascimento europeo di Antoine de Lonhy, catalogue d'exposition (Suse, Museo Diocesano, june-november 2022 / Turin, Palazzo Madama october 2021-january 2022), Simone Baiocco and Vittorio Natale (éd.), Gênes, 2021.
  • Frédéric Elsig, Antoine de Lonhy, Milan, Silvana Editoriale, 2018.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

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Liens externes[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « Études savoyardes II : le maître de la Trinité de Turin », L'Œil, no 215, p. 21.
  2. Giovanni Romano, « Monumenti del Quattrocento chierese », in Arte del Quattrocento a Chieri. Per i restauri nel battistero, Turin, 1988.
  3. a et b François Avril, « Le maître des Heures de Saluces : Antoine de Lonhy », Revue de l'Art, vol. 85, no 1,‎ , p. 9–34 (ISSN 0035-1326, DOI 10.3406/rvart.1989.347785, lire en ligne, consulté le )
  4. a b c et d Philippe Lorentz, « Une commande du chancelier Nicolas Rolin au peintre Antoine de Lonhy, 1446 : la vitrerie du château d’Authumes », Bulletin de la Société de l'histoire de l'art français, 1994, p. 9-13.
  5. a et b Philippe Lorentz, « Une œuvre retrouvée d'Antoine de Lonhy et le séjour à Toulouse du peintre bourguignon », Revue de l'art, vol. 147, 1, 2005, p. 9-27.
  6. a b c d et e Frédéric Elsig, Antoine de Lonhy, Milan, Silvana Editoriale, 2018.
  7. F. Avril et N. Reynaud, Les manuscrits à peintures en France, 1445-1520, Paris, 1993.
  8. Initiale CNRS : Mappemonde spirituelle, manuscrit, Lyon, BM.
  9. Abbé Douais, « Fresque de la Dalbade de 1454 », Bulletin de la Société archéologique du Midi de la France, 1891, no 7, p. 109-116 (lire en ligne)
  10. a b et c J. M. Madurell y Marmión, "El arte en la comarca alta de Urgel", Anales y Boletin de los museos de arte de Barcelona, 1946, p. 9-172.
  11. a et b S. Sanpere i Miquel, Los cuatrocentristas catalanes : historia de la pintura en Cataluña en el siglo XV, 2 vol., Barcelone, 1906.
  12. François Avril, 1989, p. 24.
  13. F. Elsig, La peinture dans le duché de Savoie à la fin du Moyen-Âge (1416-1536), Cinisello Balsamo, 2016.
  14. G. Romano, "Sugli altari del Duomo nuovo", dans Domenico della Rovere e il Duomo nuovo di Torino. Rinascimento a Roma e in Piemonte, éd. G. Romano, Turin, 1990, p. 263-338.
  15. A. Baudi di Vesme, Schede Veseme. L'arte in Piemonte, IV, Turin, 1982.
  16. J. Plummer, The last flowering. French manuscripts 1420-1530 from American collections, New-York, 1982.
  17. F. Elsig et Ph. Lorentz, " La place des volets dans l'oeuvre de Konrad Witz", dans Konrad Witz. le maitre-autel de la cathédrale de Genève, éd. F. Elsig et C. Menz, Genève, 2013, p. 124-135.
  18. G. Romano, "Maestro della Trinità di Torino 1470" et "Maestro della Sant'Anna di Torino 1470-1490", dans Valle di Susa. Arte e storia dall'XI al XVIII secolo, éd. G. Romano, Turin, 1977, p. 207-210.
  19. (en) Notice de l'œuvre sur le site du musée.
  20. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Antoine_de_Lonhy_Trinitat_Tor%C3%AD.jpg (it) Notice du tableau sur le site du musée.
  21. Notice sur le site du musée.
  22. Notice de la vente.
  23. Notice de la Morgan.
  24. Notice de la bibliothèque.
  25. Notice de la base JONAS de l'IRHT.
  26. Notice du ms sur le site de la BMT.
  27. C. Gardet, Les Heures d'Aimée de Saluces, vicomtesse de Polignac, et de Catherine d'Urfé sa fille. Aspects internationaux et évolution dans la peinture des États de Savoie au XVe siècle, Annecy, 1985.
  28. Notice de la Morgan.
  29. Notice et reproduction sur le site du Walters.
  30. M. Castaño, « Frédéric Elsig, Antoine de Lonhy », Bibliothèque d’Humanisme et Renaissance, 81, 2019, 1, p. 231-234.
  31. Mireia Castaño, « Un somptueux missel toulousain enluminé par Antoine de Lonhy », Peindre à Toulouse aux XVe et XVIe siècles, Frédéric Elsig (ed.),‎ , p. 70-81.
  32. J. Ainaud i de Lasarte, J. Villa-Grau, M. A. Escudero i Ribot, Els vitralls medievals de l'esglesia de Santa Maria del Mar à Barcelona (Corpus vitrearum Medii Aevi, Espanya 6, Catalunya 1), Barcelone, 1985.
  33. « Mostra - Il Rinascimento europeo di Antoine de Lonhy », sur www.palazzomadamatorino.it, (consulté le )