Bâtie

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Le terme bâtie — ou La Bâtie — est employé dans l'Est de la France — Provence, Ardèche, Bugey, Dauphiné, Savoie — et en Suisse, et dérivant du mot occitan bastida (bastide). Il peut désigner une petite ville nouvellement bâtie ou plus précisément un ensemble fortifié, maison forte.

Étymologie[modifier | modifier le code]

Le terme bâtie possède la même racine que le terme bastide[1],[2],[3],[4]. Bastide vient de l'ancien provençal « bastida », signifiant endroit fortifié ou forteresse, plus généralement une petite ville nouvellement bâtie, fortifiée, à partir du XIIIe siècle[5].

On trouve également une origine francique *bastjan qui donne « bâtir », selon le FEW[4], ou en bas latin bastia pour désigner un château ou une tour[6].

Il peut désigner, dans la partie alpine française, un bâtiment fortifié, une maison forte[4],[7].

Le Glossaire des patois de la Suisse romande à l'entrée « bâtie » renvoie à « batya » qui donne cinq sens différents au mot : 1o digue/barrage ; 2o « culée d'un pont, mur de soutènement » ; 3o « Fortification, château ; 4o « construction d’un chemin, d’un bâtiment public par un système de corvées » ; corvée » ; 5o une maçonnerie[8],[4].

Il existe les formes et dérivées suivantes : Bastie, Bathia, Bathie, Bâthie, Bâtiaz, Batie, Bâtie, Bâties ou encore Battiaz[6].

Toponyme[modifier | modifier le code]

Bâtie est un nom de lieu notamment porté par :

France[modifier | modifier le code]

Plusieurs communes françaises ont pris le nom de bâtie en lien avec l'édification d'une fortification :

Drôme
Isère
Hautes-Alpes
Savoie
  • La Bâthie (attestée en 1286, sous la forme Bastia).

Suisse[modifier | modifier le code]

Maisons fortes[modifier | modifier le code]

La bâtie, dans le sens ensemble fortifié, maison forte, possédait à l'origine un rôle strictement militaire, contrairement au château qui peut être le centre d'une seigneurie.

Limite du Dauphiné et de la Savoie[modifier | modifier le code]

Développées au cours des XIIIe et XIVe siècles, les bâties se trouvent principalement sur les limites du comté de Savoie et du Dauphiné.

L'historien Alain Kersuzan définit la bâtie comme « un ouvrage rapidement mis en œuvre, peu onéreux et facilement réparable, que les comptes appellent une bâtie »[9],[10]. L'historien Paul Guichonnet indique qu'il s'agit d'un château ou d'une maison forte édifiée par un puissant seigneur, au cours de la période du XIIIe siècle au XIVe siècles[11].

Ces constructions se trouvent principalement dans les marges entre les seigneuries de Savoie et du Dauphiné[12],[10]. Elle ne possèdent qu'un rôle militaire[12]. Elles sont ainsi mises en place durant une campagne militaire afin de marquer l'occupation d'un territoire[12].

Pour Alain Kersuzan, il s'agit d'« un moyen d'attaque et de conquête territoriale et ensuite de défense et de soutien »[12]. Il qualifie même de construction « sauvage » la Bâtie de Luisandre (construction entre 1304-1305), en Bugey, puisqu'elle devait répondre à des impératifs d'efficacité dans le conflit opposant le comte de Savoie Amédée V à ses voisins dauphinois[12]. Elle est ainsi édifiée avec les ressources accessibles rapidement, le bois et la terre[12], tout comme la bâtie ou bastide de Gironville, également en Bugey[13]. Il semble que ce soit la raison pour laquelle on ne les retrouve qu'au contact de deux territoires[12].

Paul Guichonnet en compte 19 dans les anciens territoires des États de Savoie et une dizaine en Piémont[11].

Autres édifices fortifiés[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Adolphe Gros, Dictionnaire étymologique des noms de lieu de la Savoie, La Fontaine de Siloé, (réimpr. 2004, 2021) (1re éd. 1935), 519 p. (ISBN 978-2-84206-268-2, lire en ligne), p. 51.
  2. Ernest Nègre, Toponymie générale de la France : étymologie de 35 000 noms de lieux, vol. 3 : Formations dialectales (suite) ; formations françaises, Genève, Librairie Droz, coll. « Publications romanes et françaises » (no 195), , 1852 p. (lire en ligne), n° 26514.
  3. Ernest Nègre, Toponymie générale de la France : étymologie de 35 000 noms de lieux, vol. 3 : Formations dialectales (suite) ; formations françaises, Genève, Librairie Droz, coll. « Publications romanes et françaises » (no 195), , 1852 p. (lire en ligne), n° 26515.
  4. a b c et d Hubert Bessat et Claudette Germi, Les noms du patrimoine alpin : Atlas toponymique II, Savoie, Vallée d'Aoste, Dauphiné, Provence, vol. 2, Ellug, , 464 p. (ISBN 978-2-84310-052-9, lire en ligne), p. 209-210.
  5. Ernest Nègre, Toponymie générale de la France : étymologie de 35 000 noms de lieux, vol. 3 : Formations dialectales (suite) ; formations françaises, Genève, Librairie Droz, coll. « Publications romanes et françaises » (no 195), , 1852 p. (lire en ligne), n° 26504.
  6. a b c d e et f Henry Suter, « Bastie, (...), Bâtie », Noms de lieux de Suisse romande, Savoie et environs, sur le site henrysuter.ch, Henry Suter, 2000-2009 (consulté le ).
  7. André Pégorier, Les noms de lieux en France. Glossaire de termes dialectaux, Paris, Institut géographique national, , 3e éd., 518 p. (lire en ligne [PDF]), p. 54.
  8. L. Gauchat, J. Jeanjaquet et E. Tappolet, Glossaire des patois de la Suisse romande (t.II), Genève, Droz, (lire en ligne), p. 290.
  9. Alain Kersuzan, Défendre la Bresse et le Bugey : les châteaux savoyards dans la guerre contre le Dauphiné, 1282-1355, vol. 14, Presses universitaires de Lyon, coll. « Collection d'histoire et d'archéologie médiévales », , 433 p. (ISBN 978-2-72970-762-0, lire en ligne), p. 97.
  10. a b et c Nicolas Payraud, « Châteaux, espace et société en Dauphiné et en Savoie du milieu du XIIIe siècle à la fin du XVe siècle », HAL - Archives ouvertes, no tel-00998263,‎ , p. 353 (lire en ligne [PDF]).
  11. a b c d e f g h i j k et l Paul Guichonnet, Histoire d'Arthaz-Pont-Notre-Dame, t. 92-93, Académie salésienne, coll. « Mémoires et document », , 319 p. (lire en ligne)
  12. a b c d e f g h i et j Alain Kersuzan, Défendre la Bresse et le Bugey : les châteaux savoyards dans la guerre contre le Dauphiné, 1282-1355, vol. 14, Presses universitaires de Lyon, coll. « Collection d'histoire et d'archéologie médiévales », , 433 p. (ISBN 978-2-72970-762-0, lire en ligne), p. 124-126.
  13. Article de Jean-Michel Poisson, « Recherches archéologiques sur un site fossoyé du XIVe siècle : la bastide de Gironville », publié dans Château Gaillard, vol. 12 (1985) p. 225-236.
  14. Alain Kersuzan, Défendre la Bresse et le Bugey - Les châteaux savoyards dans la guerre contre le Dauphiné (1282 - 1355), Lyon, Presses universitaires de Lyon, coll. « Histoire et Archéologie médiévales », , 433 p. (ISBN 272970762X, lire en ligne), chap. 14, p. 54-56.
  15. Nicolas Payraud, « Châteaux, espace et société en Dauphiné et en Savoie du milieu du XIIIe siècle à la fin du XVe siècle », HAL - Archives ouvertes, no tel-00998263,‎ , p. 233 (lire en ligne [PDF]).
  16. Louis Blondel, Châteaux de l'ancien diocèse de Genève, vol. Volume 7, Société d'histoire et d'archéologie de Genève, coll. « Mémoires et documents », , 486 p., p. 321.
  17. Nathalie Nicolas, La guerre et les fortifications du Haut-Dauphiné, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, , 377 p. (ISBN 978-2-82182-767-7, lire en ligne)

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

  • Laurent d'Agostino, Maud Chevalier, Christophe Guffond, Liliana Ceci, « Les châteaux du Moyen Age en Haute-Savoie, entre recherches et mises en valeur. Etat de la question et perspectives », Actes du colloque de clôture du projet AVER tenu à Aoste les 29,30 novembre et 1er décembre 2012, Aoste,‎ , p. 67-98 (lire en ligne)