Discussion:Saint-Antoine-l'Abbaye

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Texte déplacé depuis l'article sur Pierre André de Suffren[modifier le code]

Ci-dessous un texte déplacé depuis l'article sur Suffren et qui traite de cette abbaye. Voir les possibilités de l'intégrer à cet article.

Le dossier traité par Suffren, ambassadeur de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem auprès du roi de France, est complexe et va empoisonner toute la durée de son ambassade. L’affaire avait commencé en 1775, lorsque l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem avait absorbé l’ordre des Hospitaliers de Saint-Antoine, et ainsi acquis l’abbaye de Saint-Antoine, située entre Valence et Grenoble. Après y avoir établi une commanderie, le Grand Maître avait pris la décision d’utiliser une partie des immenses bâtiments disponibles pour y loger les chanoinesses de l’Ordre, congrégation alors en pleine expansion et dont le noyau était constitué par les chanoinesses du chapitre noble de Tullins. Mais l’opération se révèle calamiteuse. L’Ordre en espère, bien qu’il s’en défende, une ressource financière importante. Les familles des futures chanoinesses, accueillies en nombre illimités, pourvu qu’elles fournissent leurs preuves de noblesse, doivent en effet apporter une dot de 2 000 livres et acquitter de droits de réception élevé. La noblesse locale applaudit sans état d’âme à un projet qui lui permet de « caser » honorablement une partie des nombreuses filles cadettes qu’elle ne veut pas marier. On parle vite de 500 candidatures… Mais l’Ordre, qui a acquis l’abbaye dans des conditions financières très onéreuses et qui doit faire de gros travaux pour adapter les locaux aux besoins des chanoinesses, décide de vendre une partie des biens de l’abbaye. Cette opération n’est pas du goût des chanoinesses toujours installées à Tullins car elles estiment lésés leurs droits sur l’abbaye de Saint-Antoine. Les religieuses se lancent alors dans d’innombrables procédures contre l’Ordre, faisant saisir les biens vendus et réclamant pour elles la totalité des dots fournies par les nouvelles arrivantes novices. Le Parlement de Grenoble s’en mêle et soutient les religieuses en révolte. Les membres de cette assemblée de justice, presque tous nobles, sont en effets les premiers à chercher des places de chanoinesses pour leurs filles[1].

Suffren se montre vite agacé d’avoir à gérer ce dossier qui n’est pas loin de ressembler à un guêpier. Le bailli tente d’abord des démarches de conciliation. À la grande prieure des chanoinesses de Malte à Tullins, il écrit une lettre accommodante mais tout en la rappelant à ses devoirs religieux : « L’esprit de l’Evangile qui respire la charité et l’union ne s’accorde guère avec les huissiers, et il me semble qu’il fallait attendre les décisions du Grand Maître sur les propositions que vous lui aviez faites[2]. » En vain. Il s’adresse aussi au premier président du Parlement de Grenoble pour « calmer les chaleurs des dames de Tullins devenues chanoinesses de Malte ou au moins celle de leurs conseils. » [3] Peine perdue. Suffren, qui veut en finir accorde de larges concessions aux chanoinesses… et se fait désavouer par le Grand Maître Rohan[4]. Peu convaincu du bien fondé pour l’Ordre de toute cette procédure et de la publicité déplorable qu’elle lui fait, il fait part sans ménagement de ses doutes à Rohan : « Ce chapitre ne sera-t-il point le voile humiliant d’une avide opération de finance pour nous ? » ou bien encore « ne donnera-t-il pas le spectacle ridicule d’une fourmilière de jeunes personnes abusant de l’état le plus libre sous l’apparence d’être chanoinesse[5] ? Suffren, qui a fait preuve dans le passé de réelles qualités de diplomate, semble, au milieu de cette affaire terriblement provinciale, nettement moins à l’aise que lorsqu’il faisait face au gouverneur néerlandais de Ceylan ou au nabab Haidar Alî… Le dossier, qui sera finalement tranché au Conseil du roi, lui est entre-temps retiré par le Grand Maître qui le confie à un envoyé spécial maltais, le chevalier de Saint-Sulpice. Le bailli en gardera des traces profondes et évoquera encore peu de temps avant sa mort « la répugnance et le dégoût qu’inspire une affaire aussi désavantageuse[6]. »

--Alaspada (discuter) 15 novembre 2013 à 22:22 (CET)[répondre]

  1. Monaque 2009, p. 353.
  2. Lettre du 18 mars 1786, Archives nationales, M966.
  3. Lettre du 30 mars 1786, Ibid.
  4. Lettres du 19 août 1786 et du 19 avril 1787, Archives Nationales, M962.
  5. Propos rapportés par Rohan dans sa lettre à Suffren du 19 août 1786, Ibid.
  6. Lettre du 3 juillet 1788 à Rohan, Archives Nationales, M962.