Frères Ruellan

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Plaque sur l'ancienne maison familiale des frères Ruellan (aujourd'hui bibliothèque annexe).

Les frères Ruellan sont une fratrie de Paramé (aujourd'hui rattachée à Saint-Malo) en Bretagne qui combattit durant la Première Guerre mondiale. Sur dix-huit enfants, dix frères allèrent au front, six y tombèrent pour la France, ce qui en fait la fratrie française ayant eu le plus de morts pendant ce conflit[1],[2]. Un septième mourra une dizaine d'années plus tard, victime du gazage qu'il avait subi pendant la guerre[1].

Histoire[modifier | modifier le code]

La famille Ruellan est une famille d'ancienne bourgeoisie originaire de Bretagne, issue d'Antoine Ruellan, bourgeois en 1666 de la paroisse de Saint-Michel de Moncontour, (Côtes-d'Armor)[3],[4]. François-Laurent Ruellan, sieur des Basses (1747-1788), était avocat au parlement. *François-Julien (1836-1908), était maire de Saint-Quay-Portrieux.

Les parents des frères Ruellan[modifier | modifier le code]

Le père, Jules Ruellan, né le à Saint-Quay-Portrieux[5],[6], est armateur[3] à Saint-Malo. En , il exploite le Berryer, un trois-mâts[7].

En , il crée, avec Ange Fontan, la Société anonyme des entreprises et des terrains de Paramé-Rothéneuf[8], au capital de 2,8 millions de francs[9]. L'objet de la société anonyme est de développer le littoral de Rothéneuf en y créant une petite station balnéaire[8]. En , cette activité rendra possible la prolongation jusqu'à Rothéneuf de la voie ferrée du tramway de Rothéneuf en provenance de Saint-Malo et Paramé[9].

Le , à Saint-Jean-de-la-Motte, il épouse Marguerite Marie Julie du Rivau, née le au Mans[6]. Ensemble, ils auront dix-huit enfants. Marguerite et Jules meurent à Paramé : elle le (à 58 ans), lui le (à 71 ans)[6].

Les enfants[modifier | modifier le code]

Le , date de la publication de l'ordre de mobilisation générale, treize des dix-huit enfants sont encore vivants : dix frères et trois sœurs[10]. Mais la fratrie est alors dispersée. André et Bernard se sont établis comme éleveurs, le premier à Montevideo en Uruguay, le second à Philippeville (aujourd'hui Skikda) en Algérie, alors colonie française[11]. Stanislas vit aux États-Unis où il était parti faire fortune[3], Julius est prêtre[3]. Les dix frères soit sont mobilisés soit s'engagent et deux sœurs servent dans un hôpital militaire durant le conflit[1]. Six frères seront tués et un grièvement gazé.

Les six frères morts au combat[modifier | modifier le code]

Les six morts au front[12] sont :

Les deux frères morts des suites de la guerre[modifier | modifier le code]

  • Xavier Vincent Marie Anne Ruellan, né en [20], est lieutenant au 223e régiment d'artillerie lorsque, le , au cours d’une violente attaque par les gaz, il est sérieusement atteint[21]. Il meurt en des suites de son intoxication[22].
  • Auguste Marie Anne Ruellan, né le [23], est réformé en [22]. Il meurt en , après une paralysie de plus de vingt ans[22].

Les deux autres frères[modifier | modifier le code]

Les deux autres frères sont Stanislas, sous-lieutenant au 129e régiment d’infanterie, et Charles Ruellan, capitaine au 247e régiment d’infanterie, détaché à la mission française près l'Armée hellénique[21],[22]. Après guerre, Charles est député d'Ille-et-Vilaine de 1919 à 1924[24].

Les trois sœurs[modifier | modifier le code]

Deux des trois sœurs, Yvonne, née le , et Madeleine, née en , servent, pendant la guerre, comme infirmières à l'hôpital installé à Notre-Dame-des-Chênes[22].

Hommages[modifier | modifier le code]

Le , le journal L'Illustration rend hommage aux frères Ruellan — Auguste excepté — en leur consacrant un article titré « Les neuf frères Ruellan : une héroïque famille française »[21].

Par délibération du [25], le conseil municipal de Paramé décide d'honorer la mémoire des six frères morts pour la France en renommant « rue des Six-Frères-Ruellan », la rue de Cancale[25] où se trouvait le manoir de Brouassin[25], la maison familiale des Ruellan. Sur cette maison, devenue depuis bibliothèque municipale annexe, une plaque rappelle leur souvenir[26].

Le , jour de commémoration du vingtième anniversaire de l'armistice, le ministère de l'Éducation nationale fait rappeler dans toutes les écoles de France le souvenir des frères Ruellan : « Enfant de France, n'oublie jamais les dix frères Ruellan »[3].

La série documentaire Frères d'armes, réalisée par Rachid Bouchareb et coécrite avec Pascal Blanchard, consacre à Julius Ruellan un de ses cinquante portraits de deux minutes. Ce portrait, commenté par Lucien Jean-Baptiste, a été diffusé le sur France 3 à 20 h 40[2].

Autres fratries[modifier | modifier le code]

Si la fratrie Ruellan fut la plus touchée avec six morts, six fratries françaises ont perdu cinq de leurs membres pendant la Première Guerre mondiale[1] :

  • les Jardot, d'Évette-Salbert (Territoire de Belfort) ;
  • les De l'Estang du Rusquec de Tréflévénez (Finistère)[27] ;
  • les Falcon de Longevialle aux Côtes-d'Arey (Isère) ;
  • les Davril de Bassussarry (Pyrénées-Atlantique) ;
  • les Tramaille de Saône et Loire ;
  • les Guyomard de Plouguiel (Côtes d'Armor, anc. Côtes du Nord). Cette fratrie comprenait cinq frères et cinq sœurs. Après le décès de quatre de leurs frères, deux sœurs entreprirent à pied de se rendre à Lannion, 20 km, pour rencontrer le sous-préfet et lui demander de démobiliser leur unique frère survivant. Le préfet refusa et le dernier frère fut tué peu après[28].

Dix fratries[1] ont, quant à elles, perdu quatre membres dont les Doumer, les quatre fils de Paul Doumer[1], président de la République entre 1931 et 1932.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e et f Marc Jean (préf. Christophe Penot), Les Dix frères Ruellan, héros et martyrs : 1914-1918, Saint-Malo, Cristel, (1re éd.), 272 p., 16 × 24 cm (ISBN 978-2-84421-078-4, OCLC 750837069, BNF 43670726, présentation en ligne).
  2. a et b « Julius Ruellan, raconté par Lucien Jean-Baptiste », sur Frères d'armes, France 3 (consulté le ).
  3. a b c d et e Karine Soulard, « 11-Novembre : l'histoire des six frères Ruellan, morts pour la France », Ouest-France,‎ (lire en ligne [PDF], consulté le ).
  4. Henri de La Messelière, Filiations Bretonnes, Prudhomme, Saint-Brieuc, 1924, T.V, p. 49-58
  5. Marc Vitelli, « Jules Ruellan » [html], sur Geni (en), mis à jour le 9 décembre 2014 (consulté le ).
  6. a b et c « Jules Ruellan » [html], sur Geneanet (consulté le ).
  7. Émile Renault, Annuaire de Saint-Malo, Saint-Servan, Dol et de l'arrondissement, Saint-Malo, Renault, , p. 84 (lire en ligne, consulté le 9 septembre 2015).
  8. a et b Gaëlle Delignon, Saint-Malo-Paramé : Urbanisme et architecture balnéaires (1840-1940), Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Art et société », , 256 p., 17,5 × 25 cm (ISBN 2-86847-418-7 et 978-2-86847-418-6, OCLC 708533454, BNF 37089597, présentation en ligne), p. 77 (lire en ligne, consulté le 9 septembre 2015).
  9. a et b Gaëlle Lemonnier, « Recensement du patrimoine balnéaire de la station de Rothéneuf » [html], Ministère de la Culture (France), versé le 3 juin 1997, mis à jour le 24 septembre 2011 (consulté le ).
  10. Marc Jean, « Commentaire » [html], sur Lignes de défense : l'actualité de la défense d'ouest en est, Ouest-France, (consulté le ).
  11. Guillaume de Morant, « La famille Ruellan entre dans l'Histoire », sur parismatch.com, Paris Match, (consulté le ).
  12. Voir le site : Mémoire des Hommes [1].
  13. a b et c Patrick Loodts et Francis De Look, « Les dix frères Ruellan » [php], sur 1914-1918.be, Médecins de la Grande Guerre (consulté le ).
  14. « Jules, Marie, Ange Ruellan », sur Mémoire des hommes, Ministère de la Défense (France) (consulté le ).
  15. « Louis, Alexandre, Marie, Aimé Ruellan », sur Mémoire des hommes, Ministère de la Défense (France) (consulté le ).
  16. « André, Marie, Anne Ruellan », sur Mémoire des hommes, Ministère de la Défense (France) (consulté le ).
  17. « Bernard, Joseph, Marie, Anne Ruellan », sur Mémoire des hommes, Ministère de la Défense (France) (consulté le ).
  18. « Jean, Berchmans, Marie Ruellan », sur Mémoire des hommes, Ministère de la Défense (France) (consulté le ).
  19. « Henri, Marie, Anne Ruellan », sur Mémoire des hommes, Ministère de la Défense (France) (consulté le ).
  20. Marc Vitelli, « Xavier Vincent Marie Anne Ruellan » [html], sur Geni (en)date=mis à jour le 25 mai 2015 (consulté le ).
  21. a b et c « Les neuf frères Ruellan : une héroïque famille française », L'Illustration, no 3967,‎ , p. 304
    Le texte de l'article est reproduit dans : Laurent Llopez, « Glorifier les familles nombreuse ayant versé leur sang pour la France en 1914-1918 », sur Mémoire des soldats de ma commune, Lycée polyvalent Anguier et lycée Vuillaume, (consulté le ).
    .
  22. a b c d et e « 1914-1918 : Les Malouins dans la Grande Guerre », Saint-Malo Magazine, no 121,‎ , supplément, 12 p. (lire en ligne [PDF], consulté le ), p. 12 (consulté le 9 septembre 2015).
  23. Marc Vitelli, « Auguste Marie Anne Ruellan » [html], sur Geni (en)date=mis à jour le 25 mai 2015 (consulté le ).
  24. « Charles, Félix, Henri, Marie, Anne Ruellan », sur Base de données des députés français depuis 1789, Assemblée nationale (France) (consulté le ).
  25. a b et c « Rue de Cancale », sur cartes-postales-de-parame.waibe.fr, Paramé au passé simple, mis à jour le 13 mars 2015 (consulté le ).
  26. Les frères Ruellan, martyrs de 14-18, honorés demain, ouest-france.fr, 9 novembre 2011.
  27. Les fratries décimées pendant la Grande Guerre
  28. 1914-1918 : le triste sort des cinq frères Guyomard

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Marc Jean (préf. Christophe Penot), Les Dix frères Ruellan, héros et martyrs : 1914-1918, Saint-Malo, Cristel, (1re éd.), 272 p., 16 × 24 cm (ISBN 978-2-84421-078-4, OCLC 750837069, BNF 43670726, présentation en ligne)
  • « 1914-1918 : Les Malouins dans la Grande Guerre », Saint-Malo Magazine, no 121,‎ , supplément, 12 p. (lire en ligne [PDF], consulté le )

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]