Fruit climactérique

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Fruit de la passion : moyennement climactérique.

Un fruit (ou un légume) est dit climactérique si sa maturation est dépendante de l'éthylène[1] (agissant comme hormone végétale), et accompagnée d'une augmentation de la respiration cellulaire de ses tissus. Ces fruits ou légumes sont caractérisés par une maturation autonome après récolte, grâce à une synthèse autocatalytique d’éthylène (autrement dit : l’éthylène sécrétée par le fruit stimule sa propre production et éventuellement celle de fruits voisins)[2].

Des fruits climactériques tels que la tomate, la banane ou certains fruits rouges sont souvent cueillis au stade immature (vert). Ils subissent ensuite une maturation complémentaire artificielle au moyen de produits tels que l'éthylène, l'azéthyl ou l'acétylène qui entraînent leur mûrissement (passage d'un fruit vert mature à un fruit mûr) apportant un maximum de qualités organoleptiques. Ces fruits cueillis au stade immature développent une qualité organoleptique très inférieure aux fruits cueillis aux stades appropriés mais la maturation complémentaire réduit les pertes post-récolte. La maturation sur pied entraîne en effet des modifications biochimiques et physiologiques (ramollissement des tissus, perte d'intégrité des membranes cellulaires) et les risques associés (être attaqués par les insectes ravageurs ou des maladies post-récolte, pourrir vu leur forte périssabilité)[3].

Caractéristiques[modifier | modifier le code]

Les fruits et légumes climactériques produisent à un moment précis, et très rapidement, une grande quantité d'éthylène (« pic d’éthylène »). Ils continuent de mûrir après la récolte.

L’éthylène est un gaz incolore, inodore et très volatil produit selon des processus biochimiques internes complexes, à partir d'un acide aminé porteur d'une chaine carbonée avec une fonction thioéther (CH3–S–CH2–CH2–), la méthionine[4].

La plupart des fruits climactériques accumulent également beaucoup d'amidon en début de développement, ce qui permet de les récolter avant la maturité optimale, car l'amidon est transformé en sucres solubles pendant les phases post-récolte. Les fruits non climactériques n'ayant pas la capacité d'accumuler autant d'amidon au cours de leur développement, ils ne s'enrichissent pas en sucres solubles après leur récolte[5].

Sensibilité[modifier | modifier le code]

Tous les fruits et légumes ne produisent pas la même quantité d’éthylène et y sont plus ou moins sensibles. Son effet cumulatif agit sur la texture, l'odeur, la couleur et le goût. Son effet peut être freiné mais il est difficile de le bloquer dès que les processus autocatalytiques ont démarrés[6]. La maturité à la récolte, les conditions de stockage, la variété, l’homogénéité de maturité du lot et le temps de contact sont autant de facteurs qui influencent aussi la maturation.

Présence naturelle ou contrôlée[modifier | modifier le code]

La température idéale pour obtenir un bon mûrissement se situe entre 15 et 20 °C. L’éthylène devient efficace à partir de 16 °C et le mûrissement est fonction du temps de contact du gaz avec les fruits et légumes.

Un mûrissement homogène peut aussi s'effectuer voire s’accélérer de 3 à 6 jours par traitement en enceinte contrôlée, comme pour la banane en injectant un mélange d’éthylène et d'azote[7] ou par exemple pour l'avocat par injection de 100 ppm d'éthylène à 20 ° C durant 12 à 72 heures selon la maturité du fruit[8].

Présence bénéfique[modifier | modifier le code]

La présence d'éthylène lors du stockage peut être bénéfique pour la maturation, pour les fruits en particulier. Par exemple, le kiwi et le concombre restent sensibles à de très faibles concentrations d'éthylène (0,5 à 1 ppm), même lors d'un stockage de courte durée réfrigérée de 8 à 10° C. La salade et certaines variétés de fraises y sont très peu sensibles[6].

Chez les fruits climactériques, la maturation après récolte est possible voire nécessaire, comme pour l'avocat qui ne mûrira qu'une fois cueilli[8]. Cette maturation commence par un ramollissement et une coloration. Plus tard, elle se traduit par des dégradations physiologiques dues à la sénescence.

Présence indésirable[modifier | modifier le code]

La présence d'éthylène peut s'avérer indésirable, engendrer une perte de couleur, ou causer une altération de la peau, de l’intérieur du fruit ou du légume, voire développer une saveur désagréable, ce qui réduit d'autant leur durée de vie.

Variabilité de sensibilité[modifier | modifier le code]

La sensibilité dépend principalement de la variété et des conditions de stockage. Par exemple, la carotte et le brocoli sont peu sensibles entre 0 et 1 ° C et le deviendront au-delà, selon les conditions de stockage. Chez les professionnels de la filière, la sélection de la variété est prise en compte en fonction de cette sensibilité, afin d'en limiter les effets indésirables lors du stockage.

Insensibilité[modifier | modifier le code]

Par opposition, chez les fruits non climactériques, la maturation est indépendante de l'éthylène, et non associée à une augmentation de la respiration des tissus. La maturation après récolte est nulle à faible mais l'éthylène peut provoquer des dégradations physiologiques prématurées telles que des décolorations et de la pourriture. L'explication de ce phénomène a été précisée par la biologie prédictive[pas clair] et la modélisation : une « crise climactérique » conditionne le mûrissement et la qualité des fruits que nous consommons.

Des recherches récentes sur les systèmes de production et de perception de l'éthylène semblent montrer que cette classification simple (climactériques sensibles à l'éthylène vs. non-climactériques insensibles à l'éthylène) n'est pas complètement satisfaisante : par exemple, il existe des variétés de melons non climactériques (alors que presque toutes le sont), et le raisin (classé non-climactérique) présente de nombreux récepteurs sensibles à l'éthylène, dont l'expression est modulée au cours de la maturation[9].

Classement des fruits et légumes[modifier | modifier le code]

Le tableau ci-dessous recense les principaux fruits et légumes de non climactériques à très fortement climactériques selon leur émission d'éthylène ou leur sensibilité à l'éthylène[10],[11],[6] :

Classification Émission d'éthylène Fruits Légumes
Non climactérique sans noix, noisette, amande sèche...
Très faiblement climactérique très faible ail, chou rave...
Faiblement climactérique faible ananas, cerise, figue, fraise, framboise, mûres, myrtilles, raisin... artichaut, céleri rave, champignon de couche, échalote, navet, oignon, olive, patate douce, poivron, potiron, radis...
Moyennement climactérique modérée abricot, brugnon, citron, coing, mandarine, clémentine, fruit de la passion, litchi, mangue, orange, nectarine, pêche, pamplemousse, prune... asperge, aubergine, carotte, céleri branche, chou pommé, chou de Bruxelles, courge, courgette, endive, haricot vert, herbe fraîche, petit pois, poireau, pomme de terre, tomate, salade...
Fortement climactérique haute banane, goyave, kaki, melon, papaye, pastèque, poire, pomme, avocat... choux-fleur, concombre, épinard...
Très fortement climactérique très haute kiwi... brocoli...

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Définition sur futura-sciences.com
  2. Muriel Colin-Henrion, De la pomme à la pomme transformée : impact du procédé sur deux composés d'intérêt nutritionnel : caractérisation physique et sensorielle des produits transformés (thèse de doctorat en Sciences agronomiques), , 302 p. (HAL tel-00351179, S2CID 93089548).
  3. (en) Gebru Hailu, Belew Derbew, « Extent, Causes and Reduction Strategies of Postharvest Losses of Fresh Fruits and Vegetables – A Review », Journal of Biology, Agriculture and Healthcare, vol. 5, no 5,‎ , p. 49-64.
  4. Effet de l'éthylène sur les fruits et légumes source CTIFL
  5. Christian Chervin, « Should Starch Metabolism Be a Key Point of the Climacteric vs. Non-climacteric Fruit Definition? », Frontiers in Plant Science, vol. 11,‎ (ISSN 1664-462X, DOI 10.3389/fpls.2020.609189/full, lire en ligne, consulté le )
  6. a b et c ABioDoc, Centre National de Ressources en Agriculture Biologique, Landry et Philippe Bony, « Compatibilité de stockage courte durée - Impact de l'éthylène sur les fruits et légumes », sur abiodoc.docressources.fr, (consulté le )
  7. AIB (Association Interprofessionnelle de la Banane), CIRAD, « La qualité de la banane en mûrisserie » [PDF], sur www.fruitrop.com, (consulté le )
  8. a et b « L’avocat après récolte », sur www.fruitrop.com, (consulté le )
  9. Yi Chen, Jérôme Grimplet, Karine David et Simone Diego Castellarin, « Ethylene receptors and related proteins in climacteric and non-climacteric fruits », Plant Science: An International Journal of Experimental Plant Biology, vol. 276,‎ , p. 63–72 (ISSN 1873-2259, PMID 30348329, DOI 10.1016/j.plantsci.2018.07.012, lire en ligne, consulté le )
  10. « La maturité des fruits », sur agro-agri.fr (consulté le )
  11. « Production d'éthylène des principaux fruits », sur ctifl.fr (consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]