Marie-Claire Matip

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Marie-Claire Matip
Naissance
Éséka, Région du Centre (Cameroun)
Activité principale
Écrivaine
Auteur
Langue d’écriture Français

Œuvres principales

  • Ngonda

Marie-Claire Matip, née en 1938 à Éséka au Cameroun français, est une écrivaine camerounaise d'expression française. Si elle fait indéniablement partie des pionnières des écrivaines d’origine sub-saharienne, elle n’est pas la toute première, comme on le dit parfois[1]. Elle a publié un ouvrage, qui est aussi un témoignage sur une société africaine en pleine évolution.

Biographie[modifier | modifier le code]

Origines[modifier | modifier le code]

Marie-Claire Matip est née en 1938 à Éséka, en pays bassa. La famille des Matip y est une famille influente. Son père, Matip Ma Soundjock, a été le dernier chef traditionnel du clan de Ndog-Nje, et a appartenu à l’aristocratie même lors de la colonisation. Son père, Henri Matip[2], qui en est le chef, a plusieurs épouses et plusieurs dizaines d’enfants. Membre de l’élite autochtone, il conserve dans les années 1950 une position enviable, restant un intermédiaire entre l’administration coloniale et les populations locales, tout en soutenant en sous-main l’Union des populations du Cameroun (UPC), un parti de libération nationale ancré à gauche et particulièrement bien implanté dans la région d’Éséka[3],[4]. Marie-Claire Matip reçoit tout d’abord des cours au domicile de ses parents, par un précepteur, puis rejoint les bancs de l’école communale d’Éséka. À 13 ans, malgré les réticences de sa mère, elle entre au Collège moderne de jeunes filles de Douala, plus loin du domicile familial, en internat.

Premiers écrits d'une africaine au sud du Sahara[modifier | modifier le code]

Toute l’adolescence de Marie-Claire Matip se situe dans cette période déterminante, après la Seconde Guerre mondiale (qui a vu s’affronter les trois puissances colonisatrices présentes dans cette région, l’Allemagne d’une part, la France et la Grande-Bretagne d’autre part), et avant l’indépendance du Cameroun. C’est aussi une période où la hiérarchisation traditionnelle de la société est remise en cause, où la scolarisation commence à se généraliser et où de nouvelles perspectives s’ouvrent timidement pour les femmes africaines. C’est à cette époque qu’elle écrit un récit autobiographique, écrit en langue française, Ngonda, décrivant la vie d’une jeune fille au Cameroun. Ce texte est conservé par Marie-Claire Matip qui réussit à le faire publier quelques années plus tard, en 1958, par la Librairie du Messager. C’est de l’avis de plusieurs auteurs, le premier livre publié par une femme africaine en Afrique sub-saharienne[5],[6],[7].

Suite du parcours[modifier | modifier le code]

En 1956, à 18 ans, un concours organisé par le magazine Elle et par Air France, qu’elle remporte, lui permet de faire un premier passage dans l’hexagone. L'année suivante, elle y retourne pour une sélection d’animateur radio. Elle revient au Cameroun où elle devient la présentatrice d’une émission radiophonique pour la jeunesse. Elle rêve de devenir journaliste. En 1958, elle prépare le baccalauréat au lycée Leclerc de Yaoundé ouvert depuis une dizaine d’années. Elle suit ensuite des cours à la faculté de lettres et à la faculté de théologie protestante de Montpellier. Puis elle s'inscrit à la Sorbonne en philosophie, psychologie et sociologie. Elle y présente une thèse de doctorat ayant pour thème : «quelques aspects des rôles de la femme en Afrique»[8].

Elle se marie avec un étudiant camerounais, de culture bafia, et ils sont ensuite contraints de rester en France, ne pouvant revenir au Cameroun pour des raisons politiques. Ils ont cinq enfants, dont quatre filles[9],[note 1]. Devenue Marie-Claire Dobong'Na-Essiene[2], elle exerce différents métiers, comme secrétaire, psychologue, ou chargée d'études de marché.[10].

Ngonda[modifier | modifier le code]

Son récit de 47 pages, Ngonda, raconte de façon chronologique sa vie de sa naissance à la fin de son adolescence. Ngonda signifie « fillette » en bassa. Il illustre la vie en brousse durant l'enfance. À travers, notamment, les relations entre la narratrice et sa grand-mère, le texte incorpore les éléments de la tradition orale, importante dans cette région et apporte un témoignage sur les contes étiologiques, les mythes et les valeurs traditionnelles transmises alors aux enfants[6].

Il apporte également un éclairage sur cette société en transformation, avec les difficultés des enfants fréquentant l'école à faire accepter leur situation dans leur communauté d'origine, puis les confrontations d'idées entre ressortissants de communautés différentes dans les grandes classes, le rôle de l'écriture pour affirmer de façon autonome ses points de vue, le regard sur la condition féminine, le refus des mariages imposés par la famille, etc[6]. Ce récit qui semble en première lecture n'avoir rien de révolutionnaire adopte discrètement un point de vue féministe et revendique notamment le droit des femmes à apprendre l'écriture[11].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Trois deviendront chanteuses, sous le nom de scène d’Estha Divine (Esther, Adassa, Esta) maintenant guide spirituelle, Kriya Yogini et Maître Reiki sous le nom spirituel de Maa Tejomayee Devi et également femme d’affaires Princesse Mataji), d’Hewan (Eva, tragiquement décédée) et de Princess Erika[9], Chanteuse et actrice, après avoir fait partie avec ses sœurs du groupe Blackheart Daughters fondé par l’aînée Maa Tejomayee Devi ( Esther (Estha Divine). Et Elga manager de production musicale et cinéma.

Références[modifier | modifier le code]

  1. Hugo Bréant, « De la littérature féminine africaine aux écrivaines d'Afrique », Afrique contemporaine, vol. 241, no 1,‎ , p. 118 (ISSN 0002-0478 et 1782-138X, DOI 10.3917/afco.241.0118, lire en ligne, consulté le )
  2. a et b Abwa et Woungly-Massaga alias commandant Kissamba 2005, p. 116.
  3. Mbembé 1996, p. 255-260.
  4. Bayart 1985, p. 21-52.
  5. Decraene 1970, Le Monde.
  6. a b et c Herzberger-Fofana 2001, p. 45-51.
  7. Toman Ébossé, p. 296.
  8. Site uwa.edu.au (Université d'Australie-Occidentale)
  9. a et b Cessou 2011, Slate.
  10. Ormerod, Ormerod Noakes et Volet 1994, p. 99-100.
  11. Dehon 2013, p. 96.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Philippe Decraene, « Sa littérature est l'une des plus riches de toute l'Afrique francophone », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  • (en) Albert S. Gérard, European-language Writing in Sub-Saharan Africa, vol. 1, John Benjamins Publishing, , 1288 p. (lire en ligne), p. 156-157.
  • Beverley Ormerod, Beverley Ormerod Noakes et Jean-Marie Volet, Romancières africaines d'expression française : le sud du Sahara, Éditions L’Harmattan, , 159 p., p. 99- 100.
  • Pierrette Herzberger-Fofana, Littérature féminine francophone d’Afrique Noire Suivi d'un dictionnaire des romancières, Paris/Montréal (Québec)/Torino (etc.), Éditions L'Harmattan, , 570 p. (ISBN 2-7384-9905-8, présentation en ligne, lire en ligne), p. 45-51.
  • (en) Cheryl Toman, « Writing Childhood: Reflection of a Nation in a Village Voice in Marie-Claire Matip's Ngonda », French Literature Series,‎ , p. 81-89.
  • Elena Cuasante Fernandez, « L’articulation des genres autobiographiques chez les écrivaines de l’Afrique noire », dans L'autobiographie dans l'espace francophone: L'Afrique. II, Universidad de Cádiz. Servicio de Publicaciones, , 175 p. (lire en ligne), p. 114.
  • Daniel Abwa et Ngouo Woungly-Massaga alias commandant Kissamba, Cameroun, ma part de vérité, Minsi, , 317 p., p. 116.
  • Zénaïde Ntiranyibagira, Les récits de vie africains et antillais au féminin, ProQuest, , 210 p. (lire en ligne), p. 33-34.
  • Pascale Barthélémy, « « Je suis une Africaine... j'ai vingt ans ». Écrits féminins et modernité en Afrique occidentale française (c. 1940-c. 1950) », Annales. Histoire, Sciences Sociales,‎ , p. 825-852 (lire en ligne).
  • Sabine Cessou, « Princess Erika chante sans trop de bla-bla », Slate,‎ (lire en ligne).
  • Jacques Bessala Manga, « Les amazones de la littérature camerounaise », Langaa,‎ (lire en ligne).
  • Claire Dehon, « L'amour et l'argent : les romancières francophones d'Afrique subsaharienne dans leur rôle d'intellectuelles », dans The Contemporary Francophone African Intellectual, Cambridge Scholars Publishing, (lire en ligne), p. 96.
  • Jean-François Bayart, L’État au Cameroun, Presses de Sciences Po (P.F.N.S.P.), coll. « Références », , 348 p. (lire en ligne), p. 21-52.
  • J.-A. Mbembé, La naissance du maquis dans le Sud-Cameroun, 1920-1960 : histoire des usages de la raison en colonie, Editions Karthala, , - 438 (lire en ligne)
  • (en) Cheryl Toman et Cécile Dolisane Ébossé, « Getting to the Roots of Francophonie: Women Writers of Cameroon », Women in French Studies, vol. 2002, no 1,‎ , p. 296–310 (ISSN 2166-5486, DOI 10.1353/wfs.2002.0046, lire en ligne Accès limité, consulté le )

Liens externes[modifier | modifier le code]