Mille Regretz

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Mille Regretz de Josquin des Près par Collegium Vocale

Mille Regretz est une chanson polyphonique profane de la Renaissance franco-flamande dont le texte a été mis en musique par plusieurs compositeurs, dont Nicolas Gombert, Tielman Susato et surtout Josquin des Prés. La version attribuée à Josquin des Prés étant la plus célèbre, autant aujourd'hui qu'au XVIe siècle. Mille Regretz fut également l'une des œuvres préférées de l'empereur Charles Quint.

Histoire[modifier | modifier le code]

Cette chanson polyphonique profane à quatre voix[1], publiée par Pierre Attaingnant à Paris en 1533, est attribuée à Josquin des Prés[2]. Le texte écrit par J. Lemaire, est possiblement l’œuvre du poète Jean Lemaire de Belges[2]. La paternité de la lamentation a été remise en cause par David Fallows[3].

La chanson Mille Regretz de Josquin des Prés a inspiré une messe à Cristobal de Morales, la Missa « Mille Regretz », écrite pour l’occasion de la visite de Charles Quint — dont la version de Josquin des Prés est la chanson préférée — à Rome en 1536[4].

Analyse[modifier | modifier le code]

La lamentation est écrite en mode de mi[N 1].

Paroles[modifier | modifier le code]

Le texte se compose d’un quatrain décasyllabique, des césures internes décomposant les vers en quatre et six syllabes.

Glossaire[2]

  • regretz : plaintes, lamentations, cris, remords ;
  • eslonger (ou élonger, esloingner) : éloigner, s'éloigner de, quitter[6] ;
  • brief : bientôt ;
  • définer : décliner, mourir (sens figuré[7]).

Mille regretz de vous habandonner,
Et deslongiers vostre fache amoureuse,
Jay si grant doeul et paine doloreuse,
Quon my verra brief mes jours definer

En français moderne :

Mille regrets de vous abandonner
et de quitter votre visage amoureux.
J’ai si grand deuil et peine douloureuse
qu’on me verra vite mes jours finir.

Les éditions Salabert donnent la transcription suivante (en mode fa# et non mi)[8] :

Mille regretz de vous abandonner.
Et d'eslonger vostre face amoureuse,
J'ay si grand deuil et peine douloureuse,
Qu'on me verra brief mes jours définer.

Postérité[modifier | modifier le code]

Plusieurs compositions contemporaines sur ce même texte constituent des prolongements ou des hommages aux compositeurs de la Renaissance.

Le compositeur canadien François-Hugues Leclair créée Au regard de Mille regrets en 1995, sur la commande du conservatoire d'Aubervilliers-La Courneuve. Il en fait une révision, donnée à Montréal en 2005. L'œuvre s'adresse à une formation composée d'un chœur mixte et d'un ensemble instrumental comprenant une flûte, un cor anglais, un cor et un violoncelle[9].

Une composition de Robert Pascal, commande d’État pour quatuor à cordes, est donnée le à Lyon par le Quatuor Debussy[10].

En 2020, dans le cadre des 500 ans de la disparition de Josquin des Prés, deux jeunes compositeurs mettent à nouveau ce texte en musique pour des formations chorales. Les œuvres sont présentées à l’occasion d’un concours À Cœur Joie[11]. Le compositeur français Pierre-Édouard Pecourt remporte le 1er prix pour sa pièce Mille regretz à voix égales, le compositeur canadien Rémi Saint-Jacques, le 2e prix, pour sa pièce homonyme à double chœur mixte. Elles ont été toutes deux créées en , dans la région de Condé-sur-l'Escaut[12], ville où Josquin des Prés a terminé ses jours.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

L'écrivain Erik Orsenna y fait allusion dans son roman paru chez Stock en 2008, La Chanson de Charles Quint[13].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Le principe de la tonalité n’apparaît qu’à partir du XVIIe siècle. Au XVIe siècle, la musique est modale. Les modes modaux vont ensuite tomber en désuétude au profit de deux modes seulement : le mode majeur et le mode harmonique mineur[5].

Références[modifier | modifier le code]

  1. Cyril Gilbert, « Mille regretz », sur cgluth.net, (consulté le ).
  2. a b et c « Josquin Des Près (1440-v.1521) Mille regretz de vous abandonner », sur musique-ac-dijon.fr (consulté le ).
  3. (en) David Fallows, « Who composed Mille regretz? », Essays on Music and Culture in Honor of Herbert Kellman, Paris, Barbara Haggh,‎ , p. 214-252.
  4. « Rome, 1538 : Mille regretz de Cristobal de Morales », sur Radio France, (consulté le ).
  5. « Glossaire », sur musique.ac-dijon.fr (consulté le ).
  6. « Glossaire du français du 14e siècle, dans les chroniques de Froissart », sur histoirepassion.eu (consulté le ).
  7. Jean-Baptiste Jouancoux, Études pour servir à un glossaire étymologique du patois picard, vol. I, (lire en ligne).
  8. Henry Expert, Mille regretz de vous abandonner, Levallois, éditions Salabert, coll. « Répertoire populairede la musique Renaissance », .
  9. « Au regard de « Mille regrets » - SATB + ensemble instrumental », sur Boutique de l'Alliance (consulté le )
  10. « Œuvres », sur robert-pascal (consulté le )
  11. Marie-Pascale Despierre, « Concours de composition », sur A Coeur Joie, (consulté le )
  12. Marie-Pascale Despierre, « Journée Régionale sous le signe de la Renaissance », sur A Coeur Joie, (consulté le )
  13. Eric Orsenna, « La Chanson de Charles Quint », sur L’Archipel (consulté le ).

Liens externes[modifier | modifier le code]