Poilu mourant

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Céaux : un poilu défendant le drapeau, monté sur un piédestal.

Le poilu mourant est une œuvre rendant hommage aux soldats morts au combat durant la Première Guerre mondiale, que l'on surnommait les poilus.

Ce monument dit « poilu mourant » découle d'un type particulier de monument : funéraire-patriotique, que définit essentiellement l'usage allégorique du drapeau. Il se distingue du poilu au repos par sa moindre diffusion.

Histoire[modifier | modifier le code]

La Première Guerre mondiale a profondément meurtri la Nation. La France est un des pays qui a subi, parmi les principaux belligérants, la plus forte mortalité au combat. D'ailleurs, l'importance des pertes subies par les troupes françaises a été gardée secrète jusqu'au rapport établi en 1920 par Louis Marin, rapporteur du budget à la Chambre et chargé de chiffrer la proposition de loi visant à attribuer une somme de 1 000 francs aux familles des soldats morts pour la France. La France est frappée par un deuil de masse. Mais ce travail de deuil est ralenti par l'absence de dépouille des soldats qui sont enterrés directement sur le champ de bataille ou dans les cimetières militaires ou civils situés dans la zone armée, voire impossible quand le corps du défunt ne peut être retrouvé.

Afin de donner aux familles privées de la dépouille de leurs proches la possibilité de faire leur deuil, l'idée émerge de donner à tous ces soldats « disparus » une sépulture symbolique. Un projet, une première fois évoqué à Rennes le par François Simon, parle alors d'ouvrir « les portes du Panthéon à l'un de ces combattants ignorés morts bravement pour la patrie ». Puis, le , Maurice Maunoury propose l'inhumation d'un fantassin français inconnu au panthéon et dépose un projet de loi le en ce sens. C'est ainsi que le principe de l'inhumation d'un « déshérité de la mort » est adopté par la Chambre le de manière à incarner le sacrifice de tous les poilus et à donner un corps à pleurer à toutes les familles de soldats « disparus ». Dès lors, un véritable « culte de l'inconnu » se met en place afin d'honorer ces soldats morts pour la France.

Des monuments aux morts sont ainsi édifiés sous la pression de l'opinion publique dans la quasi-totalité des communes de France qui font office de « tombe de substitution » en l'absence de corps à enterrer. On va pour la première fois inscrire sur ces monuments le nom des soldats morts, inaugurant ainsi ce que Thomas W. Laqueur[1] appelle une « démocratie de la mort ».

L'État propose même aux communes qui en font la demande des subventions proportionnelles au nombre de leurs habitants tués à la guerre.

Sous la direction, généralement, des conseils municipaux sont ainsi édifiés ces monuments funéraires qui prennent diverses formes. Ainsi, le monument aux morts de l'église Saint-Nicolas de Craon à Mayenne prend la forme originale d'un livre d'or de 121 noms, quand le monument aux morts de la commune de Craon, lui, représente un poilu mourant en défendant le drapeau.

Chaque 11 novembre, jour anniversaire de l'Armistice, devenu férié sous la pression des anciens combattants, la République célèbre « la commémoration de la victoire et de la paix » (loi du 24 octobre 1922). Le cérémonial prévoit ainsi, avant ou après une minute de silence, l'appel de tous les morts où, après chaque nom, un enfant des écoles ou un ancien combattant répondra « mort pour la France ».

Les différentes versions[modifier | modifier le code]

Le poilu mourant est érigé en France avec de nombreuses variantes.

La version avec un buste de poilu[modifier | modifier le code]

Une variante de buste de poilu embrasse le drapeau à la façon d'un mourant embrassant un crucifix, comme la sculpture de Charles-Eugène Breton qui couronne le monument d'Arsure-Arsurette.

« Poilu mourant en défendant le drapeau » associé à une statue de la Victoire[modifier | modifier le code]

Cette statue provient du catalogue des Marbreries générales de Paris (Ursule Gourdon). Certaines communes, comme Azur ou Sainte-Marie-de-Ré, ont fait le choix d'une composition associant au modèle du poilu mourant une statue de la Victoire.

De plus, on a une autre version de cette statue, toujours des Marbreries générales, où la Victoire vient couronner un poilu mourant avec un drapeau.

La version de Jules Déchin[modifier | modifier le code]

La statue de Jules Déchin représente un poilu en uniforme couché, tête nue, tenant son fusil dans sa main droite, sa main gauche sur la poitrine. Il regarde en l'air. Sa jambe droite est fléchie.

Elle orne notamment les monuments aux morts d'Athies, Aumont-Aubrac, Béthencourt (dans le cimetière), Bief-du-Fourg, Boisleux-au-Mont, Brunembert, Chaulnes, Corcieux, Elven, Herly (dans l'église Saint-Pierre), Jouey, Juvigny-sous-Andaine, Lézardrieux, Ligny-en-Cambrésis, Les Vans, Loos-en-Gohelle, Mercatel, Ohain, Origny-en-Thiérache, Pleines-Œuvres, Ploumagoar, Pont-Farcy, Saint-Just, Saint-Porchaire, Saint-Romain-de-Colbosc, Tannois, Thiembronne et Urcel.

Galerie[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Le travail des morts, Une histoire culturelle des dépouilles mortelles, 6 septembre 2018, de Thomas Walter Laqueur.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Sémiologie et typologie des monuments aux morts, II. Commémorations collectives. Le culte du souvenir, Antoine Prost, Dans Les anciens combattants et la société française 1914-1939 (1977), pages 35 à 75.[1]
  • La République « malade de la guerre », Le temps du deuil, Chapitre V. La République au défi de la paix, Jean-Michel Guieu, Dans Gagner la paix (2016), pages 251 à 349.[2]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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