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La décision n°86-224 DC, dite décision Conseil de la concurrence est une décision du Conseil constitutionnel français du 23 janvier 1987, dans laquelle le Conseil consacre la compétence constitutionnelle de la juridiction administrative.

Procédure[modifier | modifier le code]

Georges Vedel est rapporteur de la décision. Ses propositions, quant à la solution à adopter concernant la compétence de la juridiction administrative, ont fait l'objet d'un large consensus au sein du Conseil et ont été reprises dans la décision[1].

Motivation et solution[modifier | modifier le code]

Consécration de la compétence constitutionnelle de la juridiction administrative[modifier | modifier le code]

Le Conseil constitutionnel reconnaît qu'une partie de la compétence de la juridiction administrative est constitutionnellement protégée. Il s'agit de la compétence de la juridiction administrative pour statuer sur les recours en annulation ou en réformation des actes administratifs pris, dans l'exercice de leurs prérogatives de puissance publique, par "les autorités exerçant le pouvoir exécutif, leurs agents, les collectivités territoriales de la République ou les organismes publics placés sous leur autorité ou leur contrôle"[2],[3]. Les personnes privées chargées d'une mission de service public ne sont donc pas concernées[4]. La réserve de compétence ne concerne que les recours par voie d'action[5].

Cette reconnaissance se fait sur le fondement d'un principe fondamental reconnu par les lois de la République[2],[6]. Ce principe se fonde sur la loi du 3 mars 1849 sur le Conseil d'Etat, celle du 24 mai 1872 et l'ordonnance du 31 juillet 1945[7]. Selon le publiciste Patrick Waschmann, la mobilisation de la loi du 24 mai 1872 est discutable, car le législateur ne s'était pas fixé pour objet, lors de l'adoption de cette loi, de régir les rapports entre ordres administratif et judiciaire[1].L'administrativiste Fabrice Melleray relève qu'aucun des textes sur lesquels se fonde le principe ne mentionne la compétence de la juridiction administrative, concernant la réformation d'actes. Cependant, il ressort des affirmations de Georges Vedel que si le Conseil constitutionnel s'est fondé sur des lois républicaines, il ne s'est pas fondé sur les mesures qu'elles comportent, mais sur le fait que le législateur n'a jamais écarté la compétence du juge administratif, dans les matières objet de la réserve de compétence[8].

Le Conseil constitutionnel admet que la compétence constitutionnelle de la juridiction administrative puisse être l'objet d'exceptions, de deux types : premièrement, il existe des matières "réservées par nature à l'autorité judiciaire"[2]. Il s'agit de la liberté individuelle (au sens de l'article 66 de la Constitution[9]), de la privation du droit de propriété (y compris de la propriété publique[10]), lorsque cette privation porte sur des immeubles[10], de la capacité des personnes et du fonctionnement des juridictions de l'ordre judiciaire[N 1]. Selon Les grands arrêts de la jurisprudence administrative, l'état des personnes relève également de la compétence du juge judiciaire[3]. Cependant, selon l'administrativiste Gweltaz Eveillard, l'autorité judiciaire n'est compétente en la matière que lorsque cette compétence est l'occasion d'exercer un contrôle sur le fonctionnement de la juridiction judiciaire[10]. Deuxièmement, le Conseil constitutionnel permet au législateur d'"unifier les règles de compétence dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice"[2],[3]. Le Conseil constitutionnelle précise toutefois que les aménagements prévus par la loi à la répartition constitutionnelle des compétences doivent être "précis et limités"[2],[8].

Précisions sur les droits de la défense[modifier | modifier le code]

Le Conseil constitutionnel considère, dans cette décision, que la possibilité d'avoir recours à un sursis à exécution constitue, en l'espèce, eu égard à l'importance des amendes pouvant être infligées par le Conseil de la concurrence[11], une garantie des droits de la défense[12].

Portée[modifier | modifier le code]

Dans l'arrêt Préfet de police de Paris c/ TGI Paris du 12 mai 1997, le Tribunal des conflits emploie une motivation inspirée de celle de la décision Conseil de la concurrence, sans viser ni citer toutefois la Constitution[13].

Depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, la dualité des ordres de juridiction a été consacrée explicitement, dans les dispositions relatives à la question prioritaire de constitutionnalité et au Conseil supérieur de la magistrature[13].

Dans l'arrêt SCEA du Chéneau du 17 octobre 2011, le Tribunal des conflits s'est inspiré de la formulation employée par le Conseil constitutionnel dans sa décision Conseil de la concurrence, pour délimiter la compétence constitutionnelle de la juridiction administrative[14],[15]. Il ne mentionne toutefois pas le fait que cette compétence ait valeur constitutionnelle[16], mais vise la Constitution. Selon Jacques Arrighi de Casanova, cette absence de mention s'explique par le fait qu'il est indifférent, pour la résolution du litige, que la réserve de compétence de la juridiction administrative ait, ou non, valeur constitutionnelle[13]. Dans le même arrêt, le Tribunal indique qu'il peut y avoir des dérogations à la répartition constitutionnelle des compétences afin de garantir l'application effective du droit de l'Union européenne[16] ; le juge judiciaire peut donc saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle même lorsque la nécessité de déterminer l'interprétation exacte d'une norme européenne résulte du besoin de résoudre question ressortant de la compétence de la juridiction administrative ou "lorsqu'il s'estime en état de le faire, appliquer le droit de l'Union, sans être tenu de saisir au préalable la juridiction administrative d'une question préjudicielle, dans le cas où serait en cause devant lui, à titre incident, la conformité d'un acte administratif au droit de l'Union européenne"[14].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Le fonctionnement des juridictions judiciaires doit être distingué de leur organisation.

Sources[modifier | modifier le code]

  1. a et b Patrick Wachsmann, « Le Conseil constitutionnel et le principe de séparation des autorités administrative et judiciaire », Jus politicum,‎ (lire en ligne Accès libre)
  2. a b c d et e « Décision n°86-224 DC, dite décision Conseil de la concurrence » Accès libre, sur Conseil constitutionnel
  3. a b et c Marceau Long, Prosper Weil, Guy Braibant, Pierre Delvolvé et Bruno Genevois, Les grands arrêts de la jurisprudence administrative, Dalloz, coll. « Grands arrêts », , 24e éd., p. 579
  4. André Roux, Ferdinand Mélin-Soucramanien, Eric Oliva, Laurent Domingo et Marc Guerrini, Les grandes décisions du Conseil constitutionnel, Dalloz, coll. « Grands arrêts », , 20e éd., p. 77
  5. André Roux, Ferdinand Mélin-Soucramanien, Eric Oliva, Laurent Domingo et Marc Guerrini, Les grandes décisions du Conseil constitutionnel, Dalloz, coll. « Grands arrêts », , 20e éd., p. 83
  6. Marceau Long, Prosper Weil, Guy Braibant, Pierre Delvolvé et Bruno Genevois, Les grands arrêts de la jurisprudence administrative, Dalloz, coll. « Grands arrêts », , 24e éd., p. 578
  7. Michel Verpeaux, Pierre de Montalivet, Agnès Roblot-Troizier et Ariane Vidal-Naquet, Droit constitutionnel. Les grandes décisions de la jurisprudence, Presses universitaires de France, coll. « Thémis », , 2e éd., p. 257
  8. a et b Fabrice Melleray, « En relisant la décision Conseil de la concurrence », L'actualité juridique. Droit administratif,‎ , p. 91
  9. André Roux, Ferdinand Mélin-Soucramanien, Eric Oliva, Laurent Domingo et Marc Guerrini, Les grandes décisions du Conseil constitutionnel, Dalloz, coll. « Grands arrêts », , 20e éd., p. 78
  10. a b et c Gweltaz Eveillard, « Les matières réservées par nature à l'autorité judiciaire », L'actualité juridique. Droit administratif,‎ , p. 101
  11. Marceau Long, Prosper Weil, Guy Braibant, Pierre Delvolvé et Bruno Genevois, Les grands arrêts de la jurisprudence administrative, Dalloz, coll. « Grands arrêts », , 24e éd., p. 579
  12. André Roux, Ferdinand Mélin-Soucramanien, Eric Oliva, Laurent Domingo et Marc Guerrini, Les grandes décisions du Conseil constitutionnel, Dalloz, coll. « Grands arrêts », , 20e éd., p. 86
  13. a b et c Jacques Arrighi de Casanova, « La réception par le Tribunal des conflits de la jurisprudence Conseil de la concurrence », L'actualité juridique. Droit administratif,‎ , p. 95
  14. a et b « Arrêt SCEA du Chéneau du 17 octobre 2011 » Accès libre, sur Legifrance
  15. Jean-Louis Mestre, « A propos du fondement constitutionnel de la compétence de la juridiction administrative », Revue française de droit administratif,‎ , p. 339
  16. a et b Agnès Roblot-Troizier, « L'appréciation de la légalité d'actes administratifs par les tribunaux judiciaires non répressifs », Revue française de droit administratif,‎ , p. 1136

Annexes[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]