Pont du Diable (Doubs)

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Pont du Diable
Image illustrative de l’article Pont du Diable (Doubs)
Géographie
Pays Drapeau de la France France
Région Bourgogne-Franche-Comté
Département Doubs
Commune Crouzet-Migette et Sainte-Anne
Coordonnées géographiques 46° 56′ 59″ N, 5° 59′ 54″ E
Fonction
Franchit Ruisseau de Château-Renaud (reculée du Lison)
Fonction Pont routier
Itinéraire D229
Caractéristiques techniques
Type Pont en arc
Longueur 61,5 m
Portée principale 20 m
Hauteur 70 m
Matériau(x) Pont en maçonnerie
Construction
Construction fin des années 1870
Historique
Protection Logo des sites naturels français Site classé (1912)

Carte

Le pont du Diable est un pont du XIXe siècle reliant les communes de Crouzet-Migette et Sainte-Anne, dans le département du Doubs, en franchissant une gorge au fond de laquelle coule le ruisseau de Château-Renaud dont les eaux alimentent la résurgence du Lison.

Comme beaucoup de ponts appelés ponts du Diable, sa construction est entourée d'une légende de pacte avec le Diable.

Localisation[modifier | modifier le code]

Réseau hydrographique[modifier | modifier le code]

Le pont du Diable est situé dans la reculée du Lison. Il franchit une gorge au fond de laquelle coule le ruisseau de Château-Renaud, parfois appelé Petit Lison, car ses eaux, le plus souvent souterraines, alimentent la résurgence du Lison.

Le Château-Renaud est un ruisseau à régime torrentiel[1] de 5,2 kilomètres[2]. Il prend sa source à Dournon et chemine pendant environ 2,5 kilomètres vers le Nord-Est avant d'arriver au pont du Diable, où il entame une cascade d'une trentaine de mètres, dite cascade du Diable.

Il continue ensuite vers le Nord puis l'Est sur environ 2,7 kilomètres avant d'arriver à Nans-sous-Sainte-Anne où il se jette dans le Creux Billard puis résurge au niveau de la source du Lison.

Le ruisseau et ses falaises constituent une zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF)[1].

Administration territoriale[modifier | modifier le code]

Administrativement, le pont du Diable est situé à la limite entre les communes de Crouzet-Migette, sur la rive droite, et Sainte-Anne, sur la rive gauche. En effet les 650 mètres du Château-Renaud situés en amont du pont du Diable servent de limite naturelle entre les deux communes.

Réseau routier[modifier | modifier le code]

Le pont du Diable est un pont routier situé au point kilométrique 3,95 de la route départementale 229[3]. En suivant cette route, Crouzet-Migette est à environ 1,3 kilomètre à l'Est du pont, et Sainte-Anne à environ 1,9 kilomètre à l'Ouest.

Carte
Le pont du Diable (A) relie Crouzet-Migette et Sainte-Anne (dont les limites communales sont représentées) en franchissant le Château-Renaud, ruisseau qui prend sa source en (1), se jette dans le Creux Billard en (2) et résurge dans la source du Lison en (3).

Histoire[modifier | modifier le code]

Carte postale ancienne avec une vue aérienne du pont du Diable.

Le pont du Diable est construit à l'initiative de M. Delmas, agent voyer à Besançon[4],[5],[6]. Il a pour but de sortir Saint-Anne de son isolement, qui jusqu'alors n'est accessible qu'aux piétons par une passerelle dangereuse.

Le pont est édifié à la fin des années 1870 par l'entreprise J. Frasque[7]. Crouzet-Migette refuse de participer aux frais de construction, qui sont intégralement pris en charge par Sainte-Anne, si bien que le pont est appelé à l'origine pont de Sainte-Anne[8],[9].

Un arrêté pris le par le ministère de l'Instruction publique et des Beaux-Arts classe le pont du Diable parmi les sites et monuments naturels de caractère artistique[10],[11],[12].

En 2017, le pont du Diable sert de décor pour le tournage de la série télévisée Le Chalet (dont l'action se déroule dans une autre région montagneuse de France, les Alpes) ; il s'écroule au début de la série[13].

En , la ferme équestre voisine de Crouzet-Migette accueille la deuxième édition de Festidiable, un festival rassemblant des villages de France qui possèdent un pont du Diable[14],[15] ; la première édition a eu lieu en 2016 dans l'Ariège, à Montoulieu[16], dont le pont du Diable permet de se rendre à Saint-Paul-de-Jarrat et Mercus-Garrabet.

Le pont est connu pour attirer les personnes suicidaires[17],[18],[19],[20].

Architecture[modifier | modifier le code]

Le pont du Diable est un pont en pierre à trois arches en arc plein cintre culminant à 70 mètres au-dessus du ruisseau.

Constitué d'une arche principale de 20 mètres et de deux arches latérales de 10 et 5 mètres côté rive droite, il présente une longueur totale de 61,50 mètres[21].

La clé de voute de l'arche principale est sculptée, côté amont, d'un mascaron représentant une tête de Diable grimaçante, en référence à la légende qui entoure ce pont.

Réglementation[modifier | modifier le code]

Panneau d'interdiction de la descente en rappel et du saut à l'élastique.

Le pont du Diable est un ouvrage à voie unique.

Un panneau B13 placé à chaque entrée du pont[22] indique qu'il est interdit aux véhicules dont le poids total autorisé en charge (PTAC) dépasse 10 tonnes. Il est assorti d'un panonceau M4g désignant les véhicules affectés au transport de marchandises.

La descente en rappel et le saut à l'élastique sont interdits sur le pont par arrêté préfectoral du [23].

Légende[modifier | modifier le code]

Clé de voute sur l'arche principale, sculptée d'un mascaron représentant une tête de Diable grimaçante.
Panneau touristique sur le site, expliquant la légende.

Le pont du Diable tire son nom de la légende selon laquelle l'entrepreneur chargé de sa construction, désespéré de ne pouvoir tenir le délai annoncé après plusieurs effondrements en cours de construction, conclut un pacte avec le Diable : pour terminer le chantier à temps, il accepte de lui vendre l'âme de la première personne qui franchira le pont. Rongé par le remords, il tombe malade, et le curé appelé pour son viatique est la première personne à franchir le pont nouvellement construit de la main du Diable ; il le fait fuir de son ciboire[24],[25],[26],[27],[28],[29],[30],[31].

Dans certaines sources, le récit est un peu plus circonstancié : l'histoire est parfois datée du XIe siècle[29] ou du XIIIe siècle[32],[33],[34], et l'origine de l'entrepreneur, Salins-les-Bains, ainsi que son nom, Babey[24],[29],[32],[33],[34],[35],[36] ou Babet[37], sont parfois cités.

L'écrivain et poète Charles-Émilien Thuriet, lorsqu'il rapporte cette légende en 1882 à l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Besançon puis la republie en 1891[25], indique qu'il la tient du père Borne de Crouzet.

Cette légende est typique du folklore entourant les dizaines de ponts du Diable en France et dans le monde. Elle est en particulier très proche de celle qui existe au sujet d'un autre pont du Diable, franchissant un cours d'eau au nom très proche, le Lizon, et situé dans la même région, la Franche-Comté, plus précisément à proximité de Saint-Claude dans le Jura ; dans cette légende, le Diable est trompé en faisant en sorte que le premier être à franchir le pont soit un rat plutôt qu'un humain[26],[38].

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b « ZNIEFF 430007833 : Falaises et ruisseau de Château-Renaud », sur inpn.mnhn.fr, Inventaire national du patrimoine naturel (INPN), Muséum national d'histoire naturelle (MNHN).
  2. « Ruisseau de Château Renaud [U2611120] », sur sandre.eaufrance.fr, Sandre.
  3. « S.C.N3 - 202 », Nivellement général de la France, sur geodesie.ign.fr, IGN.
  4. Congrès préhistorique de France : Compte rendu de la neuvième session – Lons-le-Saunier, 1913, vol. 4, Paris, Société préhistorique française, (lire en ligne), « Quatrième excursion, samedi  : Enceintes et tumulus du Nord du Jura – Excursion de Salins et Nans-sous-Sainte-Anne », p. 913–943 (932).
  5. Conférences de Paris : Compte-rendu de la 22e session, vol. 1 : Documents officiels, procès-verbaux, Association française pour l'avancement des sciences, , « Excursion générale à Salins, Nans-sous-Sainte-Anne, dimanche  », p. 429–435 (431) [lire en ligne].
  6. Paul Bucquet (dir.), Catalogue général de l'exposition du Ministère de l'intérieur (à l'occasion de l'Exposition universelle de 1878), Paris, Imprimerie nationale, , p. 67 [lire en ligne].
  7. Bernard Marrey (préf. Edgar Faure), Les ponts modernes, XVIIIe – XIXe siècles, Paris, Picard, , 319 p. (ISBN 2-7084-0401-6), p. 19.
  8. L.C. et Béatrice Pritzy, « Haut-Doubs : le pont du Diable à l'honneur », L'Est républicain, .
  9. « L'histoire du pont du Diable écrite à quatre mains », L'Est républicain, .
  10. « Pont du Diable à Crouzet-Migette » et « Site classé, arrêté ministériel ou décret du  », DREAL de Franche-Comté, .
  11. « Archives communales déposées de Crouzet-Migette », cote EAC5701R2, archives départementales du Doubs.
  12. Prade 1988, p. 418.
  13. Emmanuelle Litaud, « Le Chalet : massacre en huis clos à la montagne sur France 2 », Le Figaro, .
  14. Isabelle Brunnarius, « Le Pont du diable de Crouzet-Migette et Saint-Anne vaut bien un Festidiable ! », France 3 Bourgogne-Franche-Comté, .
  15. France 3 Bourgogne-Franche-Comté, « 2e Festidiable au Pont du diable de Crouzt Migette et Saint Anne », sur YouTube, .
  16. « Festidiable, la réunion des ponts du diable », L'Est républicain, .
  17. « Doubs : Nouveau suicide au Pont du Diable. Un Jurassien met fin à ses jours », sur pleinair.net, .
  18. Philippe Sauter, « Trop de suicides au pont du diable », L'Est républicain, .
  19. V.C., « Un corps retrouvé au pied du pont du diable à Sainte-Anne », L'Est républicain, .
  20. Valentin Collin, « Doubs : le pont du Diable, théâtre inquiétant de nombreux suicides », L'Est républicain, .
  21. Pont du Diable de Sainte-Anne sur Structurae.
  22. Sur Google Street View :
  23. « Pont du Diable », CDS Info 25, Comité départemental de spéléologie du Doubs, no 31,‎ , p. 16 (lire en ligne).
  24. a et b Georges Bidalot, Franche-Comté, terre de légendes, Sainte-Croix et Pontarlier, Presses du Belvédère, , 276 p. (ISBN 978-2-88419-092-3 et 2-88419-092-9), p. 60–62.
  25. a et b Charles-Émilien Thuriet, « Le pont du Diable (canton d'Amancey) » :
  26. a et b Charles-Émilien Thuriet, « Le pont-du-Diable à Pontoux (canton de Saint-Claude) » :
    • « Traditions populaires de l'arrondissement de Saint-Claude », Bulletin de la Société d'agriculture, sciences et arts de Poligny, vol. 17,‎ , p. 246–248 (lire en ligne).
    • Traditions populaires du Jura, Poligny, G. Mareschal, , p. 94–95 [lire en ligne].
    • Traditions populaires de la Haute-Saône et du Jura, Paris, Émile Lechevalier, , p. 419–422 [lire en ligne].
  27. Gérard Blacher, Les ponts du diable et leurs légendes, Thueyts, G. Blacher, , 150 p. (ISBN 2-9510838-0-7), « Nans-sous-Sainte-Anne », p. 89.
  28. Didier Cornaille, La Franche-Comté, les vallées de la Loue et du Lison : D'Ornans à Arbois, promenades et randonnées, Paris, Solar, coll. « Guides randonneur » (no 24), , 119 p. (ISBN 2-263-02524-3), p. 68–69.
  29. a b et c Jean Defrasne, Contes et légendes de Franche-Comté, Paris, Fernand Nathan, , 256 p., « Le Pont du diable », p. 52–61 [lire en ligne].
  30. Gabriel Gravier (ill. Marie-Simone Schohn), Franche-Comté, pays des légendes, vol. 1 : Légendes communes à l'ensemble de la Franche-Comté, ou à seulement une ou plusieurs contrées de la province, et légendes de l'arrondissement de Besançon, Lons-le-Saunier, Marque-Maillard, , 235 p. (BNF 34739179), p. 165–168.
  31. Marie-Charlotte Delmas, Dictionnaire de la France merveilleuse : Surnaturel, êtres fantastiques, apparitions, lieux enchantés, vol. 2, Paris, Omnibus, , 745 p. (ISBN 978-2-258-13624-3, lire en ligne), citant Thuriet.
  32. a et b Gaby Sarazin-Heidet (préf. Edgar Faure, ill. Bernard Gantner), Légendes d'Alsace et de Franche-Comté, Strasbourg, Éditions des Dernières Nouvelles d'Alsace - ISTRA, , 163 p. (ISBN 2-7165-0062-2), « Le Pont du Diable », p. 154–156 [lire en ligne].
  33. a et b « La légende du pont du diable », sur sainteanne25.com.
  34. a et b « La légende du Pont du Diable (AT 1191) », sur Franc-parler, OIF et FIPF (version du sur Internet Archive).
  35. Jean Defrasne, Franche-Comté et francs-comtois, Besançon, Camponovo, , 143 p. (BNF 32976725), p. 96.
  36. L.L., « Savez-vous quelle légende se cache derrière le pont du Diable qui relie Crouzet-Migette et Sainte-Anne ? », L'Est républicain, .
  37. « Le Pont du Diable (25) », photographie no 10, sur racinescomtoises.net : panneau sur le site.
  38. Gabriel Gravier (ill. Marie-Simone Schohn), Franche-Comté, pays des légendes, vol. 2 : Arrondissements de Pontarlier (Doubs), de Saint-Claude et de Lons-le-Saunier (Jura), Lons-le-Saunier, Marque-Maillard, , 212 p. (ISBN 2-903900-00-0, BNF 34739180), « Le Pont du Diable, à Pontoux (Canton de Saint-Claude) », p. 72.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Serge Montens, Les plus beaux ponts de France, Paris, Bonneton, , 199 p. (ISBN 2-86253-275-4), p. 67–68.
  • Marcel Prade (ill. Roger Maupin), Les Ponts, monuments historiques : Inventaire, description, histoire des ponts et ponts-aqueducs de France protégés au titre des monuments historiques, Paris et Poitiers, Errance et Brissaud, coll. « Art et patrimoine » (no 2), , 429 p. (ISBN 2-903442-81-9), p. 161. Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Joël Bôle et Patrick Fréchard, Histoire de la construction de pont du Diable ou la volonté inflexible du village de Sainte-Anne dans le Doubs, Sainte-Anne, Doubsfestidiable, 84 p.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Lien externe[modifier | modifier le code]

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