État civil indigène d'Algérie

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Actes de naissance de 1896, enregistrés sur un formulaire indiquant que leur retranscription est conforme aux prescriptions de l'article 18 de la loi du . En outre, ces actes de la commune mixte d'Aïn Témouchent dénomment les parents sous le mode patronymique et le mode traditionnel, sous la forme Patronyme / Prénom (isem) / Filiation paternelle (nasab).

L’instauration de l'état civil en Algérie est relativement ancienne en comparaison avec les pays voisins, la Tunisie (décret beylical du ) et le Maroc (dahir du ). Il a été organisé par la loi du promulguée par l'administration coloniale, modifiée par la loi , organisation rendue nécessaire par la constitution de la propriété foncière indigène (Sénatus consulte du et loi du ).

Depuis, tout Algérien porte un prénom et un nom patronymique.

Établissement de l'état civil[modifier | modifier le code]

Le système anthroponymique algérien était, jusqu’à l’arrivée des Français en 1830, essentiellement oral et fondé sur la filiation lignagère. La fixation et l’immutabilité des noms de personnes sont le fait de l’administration coloniale et correspondent à l’institutionnalisation du mode patronymique et à l’instauration de l’état civil par la loi du .

Il a été constitué de la manière suivante : le recensement préalable par commune et section de commune effectué par l'officier d'état civil a donné lieu à l'inscription de la population indigène sur un registre matrice. Cette inscription mentionnait les nom, prénoms, profession, domicile, et dans la mesure du possible l'âge et le lieu de naissance. Chaque individu se voyait attribuer un nom patronymique ajouté à son nom habituel. Ce nom était soit choisi par lui, s'il n'avait plus ni ascendant mâle dans la ligne paternelle, ni oncle paternel, ni frère aîné, soit celui choisi par le premier (ou à défaut le deuxième, ou à défaut le troisième de ces parents). Des précautions furent prises pour que tous les descendants ou collatéraux d'un même individu considéré comme ayant le choix du nom soient dotés du même nom. L'inscription sur le registre matrice donnait ultérieurement lieu à la délivrance d'une carte d'identité reproduisant les mêmes mentions. Le registre matrice, dûment homologué, devenait registre d'état-civil.

Cependant, au regard du travail colossal qui attendait l'administration qui s'était vue à court de temps, celle-ci eut recours à des individus à peine instruits et qui bâclèrent le travail. Une telle assertion se vérifie de nos jours par les erreurs de transcription, des noms n'ayant aucun lien avec l’ascendance, des énormités pour certains patronymes affectés à des individus, des frères de même père et mère qui se virent attribuer des noms totalement différents.

Les Algériens virent l'opération de recensement et d'identification d'un mauvais œil. À la fin de la campagne projetée, on mit comme base de départ à l'état matrice de l'état civil algérien l'année 1892, devenue l'année de renvoi pour tous les actes antérieurs (les naissances approximatives de tous les recensés vivants à l'époque des opérations de recensements et d'identifications furent consignés sur des registres qui ressemblent, si l'on peut dire, quelque peu à des arbres généalogiques des concernés sans pousser plus en arrière). À partir de là, l'administration fit obligation à ses administrés indigènes de déclarer toute nouvelle situation : naissances, mariages et décès. Tout contrevenant s'exposait à des sanctions sévères.

Au sujet des patronymes affectés et ce qui en résulta de l'opération d'identification des algériens, on voit des écarts d'abord par rapport à la volonté des individus mais qui ne pouvaient s'opposer au risque de se retrouver taxer de fauteur de troubles, donc passible de poursuites et de sanctions.

Choisir son nom patronymique relevait d'une insubordination pour ceux qui s'y essayaient. Donc il fallait éviter toute réclamation qui pourrait s'avérer inutile en plus du fait de déclencher le mécontentement de l'administration. Bien sûr, il y eut ceux qui firent réclamation, mais ils étaient en faible nombre et leurs requêtes furent traitées par des procès expéditifs.

Des régions réputées arabophones eurent des patronymes berbérophones[réf. nécessaire] et des régions berbérophones, comme la Kabylie, se virent attribuer des noms d'essence arabe[réf. nécessaire].

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Loi du , qui constitue l'État civil des Indigènes musulmans de l'Algérie, promulguée au Journal officiel du  ; accès sur Gallica au Bulletin des lois de la République française N°689, p. 349-353.
  • Décret du , portant Règlement d'administration publique pour l'exécution de la loi du relative à la constitution de l'État civil des Indigènes Musulmans de l'Algérie, promulgué au Journal officiel du  ; accès sur Gallica au bulletin des lois de la République française N° 769, p. 151-158.
  • Ouerdia Yermeche, « État civil (Création de l') », Jeannine Verdès-Leroux (dir.), L'Algérie et la France, Paris, Robert Laffont, [détail de l’édition], p. 350-351
  • Georges Bensadou, « Les éléments constitutifs du nom du musulman », L'algérianiste, no 130,‎ , p. 58-63 (ISSN 0180-720X)
    Aborde la question des registres matrice en page 62.
  • Ordonnance no 76-7 du , JORA No 19 du 05 , Page 214, Portant obligation du choix d'un nom patronymique aux personnes qui en sont dépourvues.
    Sur la résolution des derniers cas de SNP (sans nom patronymique) subsistant à cette date en Algérie.
  • Kamel Kateb, Européens, "Indigènes" et Juifs en Algérie (1830-1962), Paris, Ined / PUF diffusion, , 386 p. (ISBN 2-7332-0145-X, ISSN 0071-8823, présentation en ligne), Mise en place de l'état civil, page 113
    Aborde la mise en œuvre de la loi du 23 mars 1882 et ses lenteurs de la page 113 à la page 117.

Articles connexes[modifier | modifier le code]