Tisagenlecleucel

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Tisagenlecleucel
Informations générales
Princeps Kymriah
Classe antinéoplasique
Forme solution
Administration Voie parentérale
Laboratoire Novartis
Brevet oui
Statut légal
Remboursement oui
Identification
DCI 10557Voir et modifier les données sur Wikidata

Le tisagenlecleucel, commercialisé sous le nom de marque Kymriah, est un traitement de la leucémie lymphoblastique aiguë à cellules B (LAL) qui utilise les propres lymphocytes T de l'organisme pour lutter contre les cellules B malignes, après modification génétique de ces cellules T ex vivo.

Principe[modifier | modifier le code]

Les lymphocytes T d'une personne atteinte d'une prolifération cellulaire maligne sont prélevées par leucaphérèse, puis génétiquement modifiés, pour fabriquer un récepteur à la surface des lymphocytes T, associant des composants d'un récepteur de cellule T et d'un anticorps spécifique à une protéine de la cellule cancéreuse, pour exprimer un récepteur antigénique chimérique de cellule T (CAR-T) reconnaissant et ciblant la protéine CD19 présente sur les cellules B malignes[1]. Les cellules CAR-T anti-CD19 ainsi obtenues sont réinjectées (transfert adoptif de cellules), se multiplient et s’activent in vivo après leur liaison aux cellules cibles exprimant la protéine CD19, induisant l'apoptose (ou mort cellulaire programmée) de ces cellules B malignes[2].

Ce traitement a été inventé et initialement développé à l'Université de Pennsylvanie ; Novartis en a terminé le développement, obtenu l'approbation de la Food and Drug Administration (FDA) et commercialisé le traitement[3]. En , il est devenu aux États-Unis le premier traitement incluant une étape de thérapie génique approuvé par la Food and Drug Administration.

Utilisations médicales[modifier | modifier le code]

Le tisagenlecleucel est indiqué pour le traitement des patients de moins de 25 ans atteints d'une leucémie lymphoblastique aiguë (LAL) à cellules B réfractaire aux traitements habituels ou en cours de rechute. Une autre indication est le traitement d'adultes atteints d'un lymphome diffus à grandes cellules B (LDGC-B) récidivant ou réfractaire après au moins deux lignes de traitement systémique, incluant les lymphomes diffus à grandes cellules B sans autre spécification, les lymphomes à cellules B de haut grade et les LDGC-B résultant d'un lymphome folliculaire[1],[4].

Effets indésirables[modifier | modifier le code]

Des effets secondaires graves surviennent chez la plupart des patients[4].

Un des plus courants est le syndrome de libération de cytokines (SRC)[3],[5]. Il s'agit d'une affection potentiellement mortelle qui peut provoquer de la fièvre, des vomissements, un essoufflement, des douleurs avec chute grave de la pression artérielle (collapsus) et une diminution des plaquettes (éléments figurés du sang qui interviennent dans la première phase de la coagulation), de l'hémoglobine (protéine présente dans les globules rouges qui transporte l'oxygène) ou des globules blancs, notamment des polynucléaires neutrophiles et des lymphocytes. Il est fréquemment réversible sous traitement[6]. Des troubles neurologiques à type d'encéphalopathies sont également possibles[6],[7].

Chez les patients atteints de lymphome diffus à grandes cellules B (LDGC-B) des infections graves peuvent survenir également[7].

Histoire[modifier | modifier le code]

Le traitement a été développé par Dario Campana au St. Jude Children's Research Hospital et transféré à un groupe dirigé par Carl H. June (en) à l'Université de Pennsylvanie, qui n'a pas respecté les termes d'une convention ouverte MTA avec l'hôpital St. Jude, propriétaire des droits. À l'issue d'un procès, Novartis a été autorisé à développer et commercialiser le produit moyennant le versement de 12 millions de dollars à la société Juno Therapeutics (en)[8],[9].

En , le tisagenlecleucel a été désigné comme un traitement révolutionnaire par la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis pour le traitement du lymphome diffus à grandes cellules B récidivant ou réfractaire[10].

En , un comité consultatif de la FDA a recommandé à l'unanimité de l'approuver pour le traitement des leucémies lymphoblastiques aiguë à cellules B qui ne répondaient pas de manière adéquate aux autres traitements ou qui avaient rechuté[5],[11],[12]. Et en , la FDA a approuvé l'utilisation de tisagenlecleucel chez les personnes atteintes de leucémie lymphoblastique aiguë[13]. Selon Novartis, le traitement devra être administré dans des centres médicaux spécifiques, avec un personnel spécifiquement formé pour gérer les réactions possibles à ce nouveau type de traitement[14].

En , la FDA a en outre approuvé tisagenlecleucel pour le traitement des adultes atteints de lymphome diffus à grandes cellules B récidivant ou réfractaire (LDGC-B)[13],[15], sur la base des résultats de l'essai de phase II JULIET[7].

En Angleterre, le NHS a approuvé en [16] la procédure pour traiter les enfants atteints de leucémie lymphoblastique aiguë (LAL) si les traitements antérieurs, y compris les greffes de cellules souches, ont échoué, et estime que le traitement devrait s'appliquer pour 15 à 20 enfants en un an[17]. Il a fait l'objet d'une étude clinique de phase II pour la leucémie lymphoblastique aiguë à cellules B réfractaire ou récidivante[18]. Le médicament a été également autorisé par le NHS pour traiter les adultes atteints de lymphome diffus à grandes cellules B[16].

Mise en œuvre[modifier | modifier le code]

Dans un processus de 22 jours, le traitement est adapté à chaque personne. Les cellules T sont purifiées à partir du sang prélevé sur la personne, et ces cellules sont ensuite modifiées par un virus qui insère un gène dans le génome des cellules. Le gène code un récepteur d'antigène chimérique (CAR) qui cible les cellules leucémiques[11]. Il utilise le domaine co-stimulateur 4-1BB dans son CAR pour améliorer la réponse[19].

Le fait d'avoir à modifier des cellules T pour créer le traitement personnalisé a été un goulot d'étranglement majeur dans l'amélioration de la disponibilité du traitement, obligeant à transporter les cellules T extraites en Europe vers les États-Unis pour les modifier, avant de les réacheminer vers l'Europe. Novartis a agrandi une installation en France et construit une nouvelle installation à Stein, en Suisse, pour soulager ce goulot d'étranglement à partir de 2020[20]. Novartis utilise la société Cryoport Inc. pour le transport à température contrôlée nécessaire à la fabrication et à la distribution de Kymriah[21],[22].

L'extension d'indication au lymphome malin non hodgkinien (LMNH) à lymphocytes B agressifs, en troisième ligne, n'a pas été validé par l'étude clinique Belinda (étude randomisée contre traitement standard) [23].

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b « Kymriah- tisagenlecleucel injection, suspension », DailyMed, (consulté le ).
  2. (en) FDA, « FDA approval brings first gene therapy to the United States », sur fda.gov, (consulté le ).
  3. a et b « BLA 125646 Tisagenlecleucel - Novartis Briefing document to FDA ODAC » [PDF].
  4. a et b « Kymriah EPAR », European Medicines Agency (EMA) (consulté le ) Text was copied from this source which is © European Medicines Agency. Reproduction is authorized provided the source is acknowledged.
  5. a et b (en) Denise Grady, « F.D.A. Panel Recommends Approval for Gene-Altering Leukemia Treatment », sur nytimes.com, The New York Times, (consulté le ).
  6. a et b (en) Shannon L Maude et al., « Chimeric antigen receptor T cells for sustained remissions in leukemia », N Engl J Med, vol. 371, no 16,‎ , p. 1507-17. (PMID 25317870, DOI 10.1056/NEJMoa1407222, lire en ligne [html], consulté le )
  7. a b et c (en) Stephen J Schuster, JULIET Investigators, « Tisagenlecleucel in Adult Relapsed or Refractory Diffuse Large B-Cell Lymphoma », N Engl J Med, vol. 380, no 1,‎ , p. 45-46 (PMID 30501490, lire en ligne [html], consulté le )
  8. (en) Zachary Brennan, « Novartis settles CAR-T patent dispute with Juno for $12m, future payments », Biopharma Reporter, sur biopharma-reporter.com, (consulté le ).
  9. Grady, « F.D.A. Panel Recommends Approval for Gene-Altering Leukemia Treatment », The New York Times, (consulté le ).
  10. « Novartis gets second CAR-T candidate FDA 'breakthrough' tag », fiercebiotech.com, Fierce Biotech.
  11. a et b (en) Heidi Ledford, « Engineered cell therapy for cancer gets thumbs up from FDA advisers », Nature, vol. 547, no 7663,‎ , p. 270 (PMID 28726836, DOI 10.1038/nature.2017.22304, lire en ligne, consulté le )
  12. (en) Rob Stein, « 'Living Drug' That Fights Cancer By Harnessing Immune System Clears Key Hurdle », sur npr.org, National Public Radio (consulté le ).
  13. a et b (en) « Kymriah (tisagenlecleucel) », U.S.Food and Drug Administration (FDA), (consulté le ).
  14. (en) Denise Grady, « F.D.A. Approves First Gene-Altering Leukemia Treatment, Costing $475,000 », sur nytimes.com, The New York Times, (consulté le ).
  15. (en) « FDA Expands Tisagenlecleucel Approval - The ASCO Post », ascopost.com.
  16. a et b (en) National Health Service, « Interim specification for the delivery of Tisagenlecleucel Chimeric Antigen Receptor T Cell » [PDF], sur england.nhs.uk, NHS, (consulté le ).
  17. (en) Sarah Boseley, « NHS to treat young cancer patients with expensive 'game changer' drug », sur theguardian.com, (consulté le ).
  18. (en) Novartis Pharmaceuticals, « Determine Efficacy and Safety of CTL019 in Pediatric Patients With Relapsed and Refractory B-cell ALL and High Risk B-cell ALL at First Relaps », sur clinicaltrials.gov, (consulté le ).
  19. (en) Genetic Ingineering & Biotechnology News, « FDA Panel Unanimously Recommends Approval for Novartis' CAR T-Cell Therapy CTL019 », GEN, sur genengnews.com, GEN Genetic Engineering & Biotechnology News, (consulté le ).
  20. (en) John Miller, « Novartis's $90 million Swiss factory to help solve cell therapy bottleneck », sur reuters.com, Reuters, (consulté le ).
  21. « Cryoport's CEO on cell therapies' market 'robust demand' », biopharma-reporter.com (consulté le ).
  22. « Cryoport talks compliance, biopharma expansion, and Brexit », outsourcing-pharma.com (consulté le ).
  23. (en) « Novartis provides update on BELINDA study investigating Kymriah® as second-line treatment in aggressive B-cell non-Hodgkin lymphoma », sur Novartis (consulté le ).

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]