Ville impériale de Turckheim

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Ville impériale de Turckheim
(de) Reichsstadt Türckheim


(367 ans)

Blason
Blason de Turckheim
Description de cette image, également commentée ci-après
Informations générales
Statut Ville d’Empire
État du Drapeau du Saint-Empire Saint-Empire
Capitale Turckheim
Langue(s) Alémanique/alsacien, allemand, français
Religion Catholicisme
Bailliage Grand-Bailliage d'Alsace
Cercle impérial Cercle du Haut-Rhin

Démographie
Population  
~ 800 hab.[1]
~ 1 200 hab.[2]
Histoire et événements
Immédiateté impériale (statut de « ville d’Empire ») accordée par Henri VII du Saint-Empire
Alliance avec d’autres villes au sein de la Décapole
Participation à la guerre des six Deniers aux côtés de Mulhouse
Prise de la ville par l'armée suédoise de Gustaf Horn lors de la guerre de Trente Ans
Reconnaissance des droits de la France sur les villes impériales de la Décapole (traités de Westphalie)
Bataille de Turckheim durant la guerre de Hollande
Annexion par la France et maintien des institutions de la ville sous l'autorité du Roi (traités de Nimègue)
Révolution française et fin de la constitution municipale

Entités suivantes :

La ville impériale de Turckheim (en allemand : Reichsstadt Türckheim) est une ancienne cité-État du Saint-Empire romain entre et .

Village mentionné pour la première fois en , Turckheim dépend deux seigneuries avant de devenir une ville au Moyen Âge : l'abbaye de Munster et la seigneurie de Haut-Landsberg qui appartient aux Habsbourg au XIIIe siècle[3]. Le bourg se développe et ses richesses sont convoitées par les brigands et les nobles de la région. Les seigneurs de Girsberg lancent une attaque en , suivie d'un pillage perpétré par des soldats des Ribeaupierre en [4]. L'abbé accorde en plusieurs privilèges aux habitants qui demandent l'autorisation de construire un mur d'enceinte. À la suite de son élection au trône du Saint-Empire, Henri VII accorde à Turckheim une charte de franchises signée à Pise le . Le souverain permet à la cité de se fortifier, de tenir un marché et lui octroie les mêmes droits que ceux de Colmar[5]. Le statut de « ville d'Empire » est reconnu à la cité qui dispose ainsi de l'immédiateté impériale avec droit de siéger à la Diète d'Empire : elle n'est désormais plus un bien personnel d'un seigneur mais un état du Saint-Empire à part entière[6]. Elle intègre le Grand-Bailliage d'Alsace (Reichslandvogtei im Elsass) qui administre les biens impériaux de la région. Un bailliage intermédiaire est créée pour administrer les villes impériales de Munster, Turckheim et Kaysersberg où le siège de l'instance est transféré en . Le bailliage impérial de Kaysersberg (Reichsvogtei zu Kaysersberg) est alors subordonné au Grand-Bailliage[7]. La même année l'empereur Louis IV met en gage la ville et le château auprès du roi Jean Ier de Bohême. Turckheim est reprise à ce dernier après un siège mené le par les cités de Haguenau, Colmar, Mulhouse, Obernai, Rosheim et Sélestat[8],[9].

Avec les autres villes impériales de la plaine d'Alsace, Turckheim forme en une alliance connue sous le nom de Décapole qui doit garantir une assistance réciproque entre ses dix membres face aux menaces extérieures. La cité est gouvernée deux bourgmestres (Bürgermeister), un greffier et un prévôt (Schultheiss). Celui-ci rend la justice au nom du souverain du Saint-Empire. Ces quatre dirigeants sont assistés d'un conseil de six membres élus par cooptation. L'application du droit est confiée à huit échevins[10]. Les seigneurs de Turckheim ne sont toutefois pas écartés du pouvoir et conservent quelques droits sur la ville[11]. L'abbé de Munster continue de percevoir des impôts et assiste au renouvellement annuel des dirigeants de la cité, tout comme le représentant de la seigneurie du Haut-Landsberg qui compte encore des sujets parmi la population de Turckheim. Ces derniers choisissent en de prêter serment au bailli impérial, représentant de l'empereur, et de se détourner de leur seigneur, Jean de Lupfen, vassal des Habsbourg. Celui-ci s'empare alors de la ville et impose un serment d'obéissance à tous les habitants[12]. Ses actes sont condamnés par la Décapole. Des tensions similaires agitent la région. La guerre des six Deniers éclate en entre la noblesse de Haute-Alsace et Mulhouse. Celle-ci reçoit l'aide de ses alliées Turckheim, Kayserberg et Munster dont les soldats incendient les châteaux d'Eguisheim la même année. Après ces conflits, un premier accord rétablit la situation initiale à Turckheim entre la seigneurie et la ville. Un second arrangement en permet à tous les habitants de la cité de devenir exclusivement des sujets de l'Empire[13].

À la fin du XVe siècle, l'économie de la ville repose sur l'activité artisanale ainsi que la production et le négoce de vins d'Alsace[14]. La Réforme protestante échoue à s'implanter à Turckheim et n'est pas adoptée par les dirigeants de la cité qui restent catholiques. Lors de la guerre de Trente Ans la ville est occupée en par les troupes du royaume de Suède conduites par Gutaf Horn[15]. Les villes occupées par les Suédois sont confiées aux armées françaises qui y établissent des garnisons. Les traités de Westphalie de accordent au Roi de France des droits sur la ville impériale et ses alliées. Lors de la guerre de Hollande, les Français s'emparent de la cité et l'occupent à partir de [16]. Les troupes de Turenne, maréchal de France, campent dans la ville et battent l'armée conduite par l'Électeur du Brandebourg, Frédéric-Guillaume Ier, lors de la bataille de Turckheim le [17]. À l'issue du combat, les vainqueurs se déchaînent sur la cité, n'épargnant ni les femmes ni les enfants[18].

Le traité de Nimègue du marque la fin de l'indépendance de Turckheim qui est rattachée au territoire français[19]. Les institutions de la ville continuent d'exister sous l'autorité du Roi jusqu'à la Révolution française et la fin de l'Ancien Régime en [20].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Himly 1970, p. 20
  2. Grasser 1988, p. 94
  3. Vogler 2009, p. 245
  4. Mengus et al. 2013, p. 322
  5. Vogler 2009, p. 246
  6. Nicollier 2012, p. 215
  7. Wunsch 1976, p. 66
  8. Mengus et al. 2013, p. 173-174
  9. Vogler 2009, p. 247
  10. Vogler 2009, p. 248
  11. Encyclopédie de l'Alsace 1984, p. 7444
  12. Vogler 2009, p. 249
  13. Vogler 2009, p. 250
  14. Vogler 2009, p. 250-251
  15. Vogler 2009, p. 260
  16. Kintz 2017, p. 276-280
  17. Vogler 2009, p. 263
  18. Mengus et al. 2013, p. 323
  19. Kintz 2017, p. 346-348
  20. Kintz 2017, p. 356

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • [Encyclopédie de l'Alsace 1986] « Turckheim », dans Encyclopédie de l'Alsace, t. 12 : Strasbourg-Zyrl, Strasbourg, Éditions Publitotal, , p. 7442-7445.
  • [Billich 1975] André Billich, Histoire d'une ancienne ville impériale : Turckheim, Colmar, Alsatia, , 175 p. (lire en ligne).
  • [Dollinger 1991] Philippe Dollinger (dir.), Histoire de l'Alsace, [Toulouse], Privat, (1re éd. 1970), 524 p. (ISBN 2-7089-1695-5 et 978-2-70891-695-1).
  • [Grasser 1988] Jean-Paul Grasser, La Décapole, Haguenau, Musée historique, , 128 p. (ISBN 978-2-9032-1815-7 et 2-9032-1815-3).
  • [Himly 1970] François-Jacques Himly, Atlas des villes médiévales d'Alsace, Strasbourg, Fédération des sociétés d'histoire et d'archéologie d'Alsace, , 133 p. (lire en ligne)
  • [Kintz 2017] Jean-Pierre Kintz, La conquête de l’Alsace : le triomphe de Louis XIV, diplomate et guerrier, Strasbourg, La Nuée Bleue, , 604 p. (ISBN 978-2-8099-1509-9).
  • [Mengus et Rudrauf 2013] Nicolas Mengus et Jean-Michel Rudrauf (préf. Philippe Richert), Châteaux forts et fortifications médiévales d'Alsace : dictionnaire d'histoire et d'architecture, Strasbourg, La Nuée Bleue, , 375 p. (ISBN 978-2-7165-0828-5).
  • [Nicollier 2012] Béatrice Nicollier, Le Saint-Empire romain germanique au temps des confessions : 1495-1648, Paris, Ellipses, , 256 p. (ISBN 978-2-729-87577-0).
  • [Vogler 2009] Bernard Vogler (dir.), La Décapole : dix villes d'Alsace alliées pour leurs libertés 1354-1679, Strasbourg, La Nuée Bleue, , 397 p. (ISBN 978-2-71650-728-8).
  • [Wunsch 1976] Robert Wunsch, « Le Grand-bailliage d'Empire en Alsace (1273-1648) », Les Saisons d'Alsace, no 58,‎ , p. 64-78 (ISSN 0048-9018).

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]