Agedincum (ville romaine)

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Agedincum
Senones (IVe siècle)
Image illustrative de l’article Agedincum (ville romaine)
Tour de la Brèche (vestige du rempart du Bas-Empire).
Localisation
Pays Drapeau de l'Empire romain Empire romain
Province romaine Haut-Empire : Gaule lyonnaise
Bas-Empire : Lyonnaise quatrième
Région Bourgogne-Franche-Comté
Département Yonne
Commune Sens
Type Chef-lieu de Civitas
Capitale de la Lyonnaise quatrième ou Sénonie au Bas-Empire
Coordonnées 48° 11′ 52″ nord, 3° 16′ 55″ est
Altitude 62 m
Superficie 120 ha
Géolocalisation sur la carte : Empire romain
(Voir situation sur carte : Empire romain)
Agedincum
Agedincum
Histoire
Antiquité Empire romain

Agedincum est le nom latinisé d'une cité gallo-romaine qui devint par la suite la ville de Sens dans le département de l'Yonne.

Historique[modifier | modifier le code]

Avant l'arrivée des Romains[modifier | modifier le code]

Avant la conquête romaine, la région est habitée par un peuple gaulois, les Sénons dont Brennus est le chef au IVe siècle av. J.-C. (conquête de Rome en -389). L'agglomération, ouverte, remonte au moins au IIe siècle av. J.-C. voire au IIIe siècle av. J.-C. Elle se trouve au nord du confluent de l'Yonne avec la Vanne, près d'un gué ou d'un pont sur l'Yonne et au croisement de deux voies de circulation : l'une, nord/sud, relie la vallée de la Saône au bassin de la Seine ; l'autre, ouest/est, relie le val de Loire et la Champagne[1]. Elle est appelée Agiedic par les Gaulois[2].

De cette époque il reste quelques couteaux de pierre polie et d'autres non polis, des colliers, bracelets et anneaux en bronze trouvés dans des sépultures, quelques monnaies des anciens rois sénonais, quelques menhirs celtiques, des tessons de poteries… Les tombelles de Saint-Martin-du-Tertre[3] (1,6 km nord-ouest du pont de Sens) ont livré quelques cendres, des haches en silex et des broches en fer assez bien conservées (fait rare pour le fer)[4].

La conquête romaine[modifier | modifier le code]

Lorsque César et ses légions arrivent à Sens, le roi de Sens est Moritasgus. César veut le remplacer par son frère Cavarinus mais les Sénons s'en révoltent, conduits par Accon et Drapès. Vaincus, Accon est supplicié — ce qui, selon Mémain, amène la coalition gauloise commandée par Vercingétorix, la défaite gauloise à Jully, le siège d'Alise et la suite que l'on sait. Pendant ces événement, César laisse une garnison à Agedincum sous la commande de Labiénus[3].

Il a été question d'un camp établi par César au lieu-dit « le camp de César » dans la plaine de Véron au sud de Sens, où César aurait fait hiverner six légions en 53 av. J.-C., lors de l'invasion de la Gaule[réf. nécessaire]. Mayaud (1888) élimine la possibilité de ce camp à la Motte du Ciar et dans la plaine de Véron[5], notant au sujet de cette dernière qu'il n'y a pas de lieu plus défavorable pour un campement[6]. Ces Camps de César sont généralement des appellations tardives de l'époque classique qui correspondent habituellement à des sites de l'Âge de fer ou/et de l'époque médiévale[réf. nécessaire] (comme par exemple le « Camp de César » à Nucourt, Val-d’Oise[7]). En 1845 aucune découverte archéologique en rapport avec les légions de César n'a été faite sur le site de Véron. En revanche la Motte du Ciar, près du confluent de la Vanne et de l'Yonne, a été une forteresse gauloise reprise par les romains, ainsi qu'un un sanctuaire gallo-romain et a livré de nombreux vestiges archéologiques (monnaies, médaillons, fragment de marbres, etc.)[8].

Agedincum sous le Haut-Empire[modifier | modifier le code]

La cité, dénommée Agedincum[9] par Jules César dans les Commentaires.

Sous le Haut-Empire, des bâtiments et diverses infrastructures sont construits pour y améliorer le confort. Au IIe siècle, un aqueduc de seize kilomètres va chercher de l'eau de source dans la vallée de la Vanne. Des vestiges archéologiques attestent de la présence d'un amphithéâtre, d'un forum et de thermes. Les thermes, et surtout la façade, devaient présenter des sculptures variées[9].

À cette période, l'aristocratie locale possède des maisons décorées avec des mosaïques et chauffées grâce à l'hypocauste[9].

La ville gagne peu à peu la plaine orientale. Sa superficie est environ cinq fois supérieure aux vingt-cinq hectares de la fin du IIe siècle. Des familles de la cité poursuivent un cursus honorum remarquable qui les porte jusqu'à la dignité de consul à Rome. Une garnison semble prendre place dans un camp permanent à Mâlay (le Grand).[réf. nécessaire]

La ville figure sur l'itinéraire d'Antonin et la table de Peutinger[10], cette dernière ne le mentionnant que comme distance d'étape à l'est d'Aquis Segeste (Sceaux).


Rétractation de la cité au Bas-Empire[modifier | modifier le code]

Au Bas-Empire, la ville est protégée par une muraille, dont les matériaux sont prélevés sur les édifices construits au Haut-Empire. Les fortifications parcouraient une distance de trois kilomètres, en prenant en partie appui sur l'Yonne et étaient parmi les plus imposants de la Gaule romaine. La muraille repose sur de grands blocs de pierre issus de bâtiments publics ou de monuments funéraires. Afin de rendre la ville plus facilement défendable, la superficie de cette dernière se réduit (environ 25 hectares[11])[9].

Du fait de la réforme administrative de Dioclétien, la cité de Sens devient la capitale de la province de la quatrième Lyonnaise[12]. La future province ecclésiastique poursuit ce cadre hérité de l'Empire romain. Comme de très nombreuses cités romaines de Gaule (ex. Lutèce), la ville prend le nom du peuple dont elle est le centre administratif et commercial. La cité est désormais appelée Sens.

La ville moderne est située exactement sur l'agglomération romaine : la fortification de la ville médiévale correspond au castrum construit pendant l'Antiquité tardive au centre de la ville[1]. Elle a conservé son plan à deux rues principales perpendiculaires decumanus et cardo, et une partie de son enceinte romaine.

Vestiges[modifier | modifier le code]

On a retrouvé des vestiges de drains[Où ?] faits par les Romains afin d'élever l'eau d'une source, à la manière d'un puits artésien. Ces travaux étaient destinés à alimenter un aqueduc.[réf. nécessaire]

Le rempart du Bas-Empire[modifier | modifier le code]

Des portions du rempart construit au Bas-Empire sont visibles Cours Chambonas avec pierre de gros appareil à la base et petit appareil dans les parties hautes. On retrouve le même dispositif à la poterne. La tour de la Brèche présente un mur de petit appareil de pierre avec chaînage de brique (Opus mixtum) caractéristique des constructions romaines de ce type.[réf. nécessaire]

Les stèles du musée[modifier | modifier le code]

La stèle des deux époux âgés.

Le musée conserve une collection lapidaire parmi laquelle une quarantaine de stèles funéraires entières, une dizaine de fragments de stèles et d'épitaphes. Sur ces stèles on peut voir différents personnages avec différents statuts sociaux : citoyens et non-citoyens, ouvriers, personnes nobles, etc., comme par exemple[13] :

  • la stèle des « Deux époux âgés » qui sont vêtus de toges et devaient donc être citoyens romains. Cette stèle funéraire du IIIe siècle a probablement été réalisée par les soins de leur fils Atilius Pompeianus.
  • la stèle du forgeron du IIe siècle. Le forgeron est représenté debout et s'apprête de son marteau à forger une bande de métal sur une enclume. Derrière lui, dans le fond de la niche, sont suspendus ses outils. À ses pieds, un chien tient un lièvre en arrêt. Sur le haut de cette stèle est écrit « D.M MEMOR BELLICCI BELLATOR... » (« Au dieux et à la mémoire de Bellicus fils de Bellador »).

Le musée conserve également des épitaphes comme celle d'un gladiateur datant de la fin du IIIe siècle av. J.-C., des mosaïques et des outils ayant trait à plusieurs métiers :

  • travail du tissu (ciseaux de l'époque),
  • travail du bois (flèches),
  • travail de l'argile (poteries),
  • travail du métal...

ou des objets de la vie quotidienne (objets de toilettes et parures)[13].

L'inscription d'un monument élevé à Caius César (fils adoptif d'Auguste, 20 av. J.-C. - an 4) a été trouvée à Sens sur la rive gauche de la rivière Yonne, un peu en amont du pont. La plaque mesure 60 cm de hauteur pour 86 cm de largeur, épaisseur 8 cm. La dédicace, sur la face, est : « IVINEPOIIPONIIFICI OSIMPPRINCIPI IVVENTVTIS TASSENONVM » (transcription : « (D)IVINE POTI PONTIFICI (C)OS JMP PRINCIPI IVVENTVTIS (CIV)ITAS SENONVM »). Après avoir fait partie de la collection Tarbe (à Sens) en 1825, elle a été donnée au musée en 1847[14].

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Nouvel et al. 2015, paragr. 1.
  2. Mémain 1885, p. 1.
  3. a et b Mémain 1885, p. 3.
  4. Mémain 1885, note 1, p. 63.
  5. [Mayaud 1888] S. P. Mayaud, « Recherches sur la position du camp de César in Senonum finibus Agendici à Château, commune de Villeneuve-sur-Yonne » (lu à la Sorbonne le 16 avril 1884, réunion des Sociétés savantes), Bulletin de la Société Archéologique de Sens, t. 14,‎ , (voir p. 101) (lire en ligne [sur archive.org], consulté en ).
  6. Mayaud 1888, p. 96.
  7. [Toupet & Blondeau 2009] Christophe Toupet (responsable d’opération) et Céline Blondeau, « Nucourt (Val-d’Oise). Camp de César » (dans « Chronique des fouilles médiévales en France en 2008 » > III. – « Constructions et habitats fortifiés » > III 3. – « Fouilles programmées »), Archéologie médiévale, no 39,‎ (lire en ligne [sur journals.openedition.org], consulté en ).
  8. [Guilbert 1845] Aristide Guilbert, Histoire des villes de France, vol. 3, Paris, Furne & Cie / Perrotin / H. Fournier, , 624 p., sur books.google.fr (lire en ligne), p. 108.
  9. a b c et d Bataille et al. 1992, p. 26
  10. [Nouvel et al. 2015] Pierre Nouvel, Anne Delor-Ahü, Émilien Estur et Stéphane Venault, « Sens/Agedincum, cité des Sénons » », Gallia, t. 72I, no 1,‎ , p. 231-246 (DOI 10.4000/gallia.1546).
  11. Coulon 2006, p. 21
  12. Bataille et al. 1992, p. 29
  13. a et b « Liste d'objets au musée de Sens », sur pop.culture.gouv.fr (consulté en ). Affiner la recherche avec les choix disponibles sur la gauche de l'écran.
  14. « Inscription d'un monument élevé à Caius César », notice no 01890001172, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Joconde, ministère français de la Culture.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • [Bataille et al. 1992] Alain Bataille, Pascal Dibie, Jean-Pierre Fontaine, Jean-Charles Guillaume, Jean-Paul Moreau, Ferdinand Pavy, Line Skorka, Gérard Taverdet et Marcel Vigreux (préf. Henri de Raincourt), Yonne, Paris, Éditions Bonneton, , 428 p. (ISBN 2-86253-124-3). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article.
  • [Bitton 1943] Frédéric Bitton, Histoire de la ville de Sens, Paris, Albin Michel, , 110 p. (présentation en ligne).
  • [Coulon 2006] Gérard Coulon, Les Gallo-Romains : vivre, travailler, croire, se distraire - 54 av. J.-C.-486 ap. J.-C., Paris, Errance, coll. « Hespérides », (ISBN 2-87772-331-3).
  • [Guilbert 1845] Aristide Guilbert, Histoire des villes de France, vol. 3, Paris, Furne & Cie., Perrotin, H. Fournier, (lire en ligne). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article.
  • [La Vernade 1846] Charles Larcher de La Vernade, Histoire de la ville de Sens, Sens, Gallot, (réimpr. éd. Culture et civilisation, Bruxelles, 1976).
  • [Mémain 1885] Théophile Mémain, Sens : histoire et description : nouveau guide des voyageurs dans la ville de Sens, Sens, libr. A. Mosdier, , 64 p., sur gallica (lire en ligne). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

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